Dans ce roman, le choix des mots et l’écriture sont particulièrement justes. Qui plus est, l’auteur ne s’embarrasse à aucun moment de considérations superflues et de fioritures scripturales.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que Gorô, le protagoniste du livre, revêt bien les traits du caractère toxique de Narcisse. Il se dédouane donc de son individualisme viscéral, vit sa méchanceté naturellement. Les autres, qui constituent un miroir biographique puisqu’ils le mettent face à son manque éthique, l’inexistence d’un code d’honneur chez lui, ne parviennent pas à atteindre ce monstre d’égoïsme trop sûr de lui. Les critiques qu’on peut lui faire ne suscitent aucune mise en question et n’atteignent pas son inconséquence. Il résiste aux conflits en castrant incessamment sa famille, ses maîtresses et tous ceux qui se trouvent sur son chemin, mais qui lui feront payer très cher quand viendra l’heure de sa totale disgrâce. Parfait machiste, il attend que les femmes qui l’entourent soient toutes à son service, puisqu’il n’est pas du genre à s'abaisser aux tâches ménagères...
Ce livre constitue une critique intéressante de la conscience spectatrice d’elle-même, encouragée par le millefeuille dessiné des strates sociales favorisées.