Je vais pleurer, c'est trop triste
Au summum de son écriture, une maîtrise totale de ellipse, B.E. Ellis balade son lecteur sur cette frontière qui lui est chère entre conscient et inconscient, bien et mal - cette bonne vieille recette qui fait de ses personnages des borders terriblement dérangeants.
Voilà pour le contenant.
Le contenu, lui, est discutable. Bien sûr il y a ce fond proprement dégueulasse (vous me suivez?): quadras pourrissant sur leurs faits de jeunesse, incapables de se regarder dans ces miroirs sur lesquels ils ont tellement tapé; ville écrasée de soleil; ces showbiziens manipulateurs tout en BlackB et limo); la fameuse parano ellissienne, grande inspiratrice de scènes sanglantes; et le principe du "que sont-ils devenus, ces enfoirés, vingt-cinq ans plus tard" (puisqu'on est ici en présence des personnages de Moins que zéro, le premier roman d'Ellis) - dans la veine de la Belle Vie, du copain McInerney, qui reprenait les personnages archiyuppies 80's de Trente ans et des poussières.
Mais si tous les ingrédients sont là, il reste une impression, le livre avalé en deux heures (interlignage maxi, corps 30, une lettrine par page - ça parlera à certains), de savoir-faire expédié, de leçon apprise par coeur - mais sans coeur.
En gros, Ellis sait faire, mais comme ses personnages, il ne semble plus avoir la foi - sur ce coup-là, en tout cas.