Je ne connaissais pas du tout le personnage ni l'histoire de Bruno Sulak, ce "gentleman braqueur". J'ai donc fait sa connaissance lorsque la plume originale de Philippe Jaenada lui a redonné vie le temps d'un bouquin. Jaenada, je ne connaissais pas, mais il s'est inscrit dans cette mode narrative que j'avais découvert chez Emmanuel Carrère, et que l'on retrouve également chez Laurent Binet, qui permet à l'auteur d'exister dans le récit, de partager ses impressions, ses émotions, alors qu'il est entrain de nous parler de quelqu'un d'autre. Quelque part, c'est un peu égocentrique de vouloir faire parler de soi quand on parle des autres, mais on s'habitue au style, même si les digressions n'apportent rien au fond de l'histoire.
Jaenada nous présente donc Sulak, une biographie sans en être une qui débute de manière un peu brouillonne, puisqu'elle suit en parallèle les débuts de plusieurs personnages qui auront ensuite leur importance dans le récit. Ce Sulak, il fascine : c'est un joli garçon, intelligent mais pas très sage, dont les idées dans le fond n'appellent pas vraiment à débattre ; le genre de gangster à morale qu'on essaie de nous vendre au cinéma a bien existé.
Sous la plume de l'auteur, on suit les faits d'armes de celui qui deviendra l'ennemi public numéro 1 peu après Mesrine, et qui pouvait se targuer de n'avoir jamais blessé quiconque lors de ses nombreux cambriolages ! De ses grands moments à sa chute tragique (au propre comme au figuré), Sulak fait rêver, rappelle la France des annes 70-80 avec juste ce qu'il faut de nostalgie pour nous donner envie de faire partie de la bande. L'histoire s'achève sur une incertitude, celle qui a entouré la mort de Sulak, et sur la certitude d'avoir perdu un bandit comme on n'en fera plus.
So long, Bruno.