Lâcheté et mensonges
Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...
Par
le 29 nov. 2019
205 j'aime
152
Le site est de retour en ligne. Cependant, nous effectuons encore des tests et il est possible que le site soit instable durant les prochaines heures. 🙏
Pour la plupart des Français, le triomphe ultime du Rock français se nomme Téléphone, et il y a de grandes chances qu’il en soit ainsi pour toujours, étant donnée la marginalisation croissance de cette musique. Bien entendu, on pourra toujours dire que, par exemple, Noir Désir a été un groupe bien plus original, bien plus fort. Que la France a donné naissance à des centaines d’artistes ou de groupes de Rock talentueux, passionnants, originaux, et bien plus intéressants artistiquement que Téléphone. Mais peu importe finalement, Téléphone est Téléphone, quasiment intouchable, même s’il est facile – et assez courant – de se moquer de la voix et de l’inspiration éternellement adolescente de Jean-Louis Aubert, de ses textes de « petit malin » parfois maladroits. Et puis, il y a quand même ces cinq albums impeccables, dont l’un au moins est un véritable chef d’œuvre qui aurait, s’il n’avait pas été chanté en français, être un hit international, Au Cœur de la Nuit.
Bref, il est logique de voir la superbe collection « Cover » (du moins c’était son nom à l’origine, mais on s’éloigne peu à peu de l’idée originale qui était de parler surtout de l’album à travers son image, sa pochette) des Editions du Layeur consacrer un volume à Téléphone, après Pink Floyd, les Stones, Cohen et d’autres : finalement, Téléphone mérite sa place à côté de ces géants, même si leur impact fut hexagonal plutôt que global. Ce qui est intéressant, et ce n’est pas anodin, c’est que, comme ce fut le cas avec le Rolling Stones d’Alain Gouvrion, ce Téléphone bénéficie avant tout d’un texte remarquable de Julien Déléglise, journaliste et écrivain, mais surtout passionné de Rock : ce texte, riche de détails biographiques pas forcément connus – et même si on se perd parfois au fil des récits des conflits amicaux et amoureux entre les quatre membres du groupe – témoigne d’une passion pour le groupe, d’un enthousiasme pour sa musique, d’une volonté quasiment fiévreuse de transmettre cet amour au lecteur, qui rendent la lecture de Téléphone quasiment compulsive !
Bien sûr, l’histoire du groupe elle-même ne constitue qu’une moitié des 240 pages du livre, le reste étant consacré aux carrières en solo d’Aubert et Bertignac, qui sont forcément moins passionnantes : c’est néanmoins une partie du livre qui traite d’albums bien moins connus, moins importants aussi historiquement, moins Rock aussi (Aubert est allé peu à peu vers la chanson française, ce que l’on peut regretter) en nous donnant envie de les découvrir, ce qui est évidemment une excellente chose.
Et puis, il y a cette conclusion tellement émouvante, qui est a priori celle voulue par Aubert, Bertignac et Kolinka, avec le retour des Insus (les « Insu-portables », version du téléphone pour les années 2010), et cet au revoir / cet adieu final à un groupe qui représente pour beaucoup d’entre nous un adieu à des années plus gaies, plus rebelles, plus positives que celles que nous vivons aujourd’hui. S’il y a une chose que ce beau livre nous dit, c’est que notre monde, qui est déjà un « autre monde » aurait vraiment besoin d’un autre Téléphone.
[Critique écrite en 2023]
https://www.benzinemag.net/2023/07/16/telephone-de-julien-deleglise-la-musique-dun-autre-monde/
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.
Créée
le 16 juil. 2023
Critique lue 36 fois
3 j'aime
Du même critique
Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...
Par
le 29 nov. 2019
205 j'aime
152
Il y a longtemps que les questions morales liées à la pratique de l'Art Cinématographique, chères à Bazin ou à Rivette, ont été passées par pertes et profits par l'industrie du divertissement qui...
Par
le 15 janv. 2020
192 j'aime
118
Cette chronique est basée sur ma propre interprétation du film de Charlie Kaufman, il est recommandé de ne pas la lire avant d'avoir vu le film, pour laisser à votre imagination et votre logique la...
Par
le 15 sept. 2020
190 j'aime
25