Ce que je vais dire ici doit être considéré comme en état de suspension indéfinie. En attendant la suite. Car il y en a deux, plus une en attente, et je ne les ai pas lues.
Pour l'instant, ce premier opus de la tri/tétralogie est un roman de fantastique-guerre-diplomatie-d'époque-indéfinie qui a autant de qualités que de défauts. C'est bien écrit mais.. çà et là, l'auteur a laissé des anachronismes bizarres ("clockwise" dans un univers où il ne semble pas y avoir d'horloges.. "micromanaging" dans un univers où.. bon, ce mot n'a rien à faire; mais Seth Dickinson a étudié à l'université de Chicago, qui a "inventé" le néo-libéralisme, alors peut-être que ça a laissé des traces?) à moins que cela ne se passe dans le futur, auquel cas, ces mots seraient des résidus anciens..? Impossible à dire tant qu'on n'a pas lu les suites et la fin.. qui n'est pas encore sortie.
Certes, l'univers est intéressant mais la confusion initiale est préjudiciable au plaisir de la lecture. La carte fournie est très insuffisante pour se repérer. D'un autre côté, la narratrice est censée être très jeune quand on l'arrache à son monde, donc ne pas pouvoir tout en comprendre. Alors, est-ce justifié? Oui, un peu, mais on est quand même perdu.
Ce qui me gêne encore plus, c'est la "logique" des raisonnements suivis par les personnages. Ils sont capables de discuter pendant des heures pour décider d'une stratégie à suivre.. pèsent le pour et le contre.. estiment la valeur de leurs adversaires et leurs réactions.. pour finalement décider de faire un truc totalement hors-sol.. qui marche quand même! Ah? OK. Déduisons-en que l'auteur confond "logique" et "cohérence". J'ai plutôt l'impression qu'il a cherché à imiter la capacité de GRR Martin à surprendre les lectors avec ce qu'ils savent déjà, sauf qu'ici, ça ne marche pas.
A vrai dire, les petites allusions (cachées ou non) à "Game of thrones" sont si nombreuses que cela en devient gênant. La distance entre hommage et plagiat est maigre ; un faux pas est vite franchi.
Pour sauver Baru Cormorant, il faudra(it) donc que je lise toute la suite. Hélas, je n'en ai pas très envie. Car qui peut s'attacher à une protagoniste qui fait tuer des innocents pour mieux se venger plus tard des coupables qui ont détruit son monde mais lui ont permis de devenir un monstre? Est-ce que cela va devenir une énième justification/adoration de la mentalité de psychopathes qui fascine notre époque (enfin, la leur)?
Le blog de l'auteur ne dit pas son âge, mais je pense qu'il est jeune. J'ai compris que le sujet latent était le racisme.. (ce qui est corroboré par le sujet de la thèse qu'il a commencée à l'UNY: le biais racial lors de la réaction tirer/ne pas tirer chez les flics US) mais je ne comprends pas comment il est articulé dans le récit. Est-ce une simple inversion des rôles?
Bref, en suspens.. jusqu'à la chute ou l'élévation suprême.