Thérèse Raquin par Diothyme
Dans la ville de Vernon, en bord de Seine, Madame Raquin élève son jeune fils Camille, un enfant malingre et souffreteux. Un jour, son frère lui ramena une petite fille, dont la mère, algérienne, était morte, il la lui confia, avant de retourner mourir en mer. Cette femme était veuve et vouait une admiration et un amour immodéré pour son fils, cependant, elle éleva bien la jeune fille, qui couchait dans le même lit que sa progéniture naturelle, et avec qui elle partageait même les médicaments. Mais la nommée Thérèse était d'une tout autre nature, elle nourrissait un sang plus ardent, et des désirs de liberté que le temps lui apprit à réprimer. Elle devint une femme fade et passive qui se soumettait aux désirs de sa tante, plus par habitude que par réelle gratitude. Mme Raquin avait prévu depuis la prime jeunesse de ses enfants de les marier l'un à l'autre, et cela paraissait tout naturel à la famille, bien que Thérèse et Camille, même adolescents, n'aient jamais eu d'attirance l'un pour l'autre. A leurs dix huit ans on célébra leurs noces, sans émois, et leur vie continua dans leur quotidien morne. Mais Camille fait des caprices, il a des rêves de grandeur et veut s'installer à Paris, et comme sa maman ne sait rien lui refuser, elle trouve une petite mercerie sordide pour que Thérèse et elle y travaillent et ils s'installent dans la capitale. La jeune femme déprime encore plus là-bas, jusqu'à ce que son mari lui présente un ami d'enfance retrouvé par hasard, Laurent, peintre raté, rustre et paresseux. Les instincts primitifs de Thérèse s'enflamment et elle s'entiche de lui. Lui, ne voit que le côté pratique d'une liaison avec la femme de son ami, l'accueil de Mme Raquin, et une relation avec ses avantages et sans ses inconvénients. Ils finissent par devenir amants. Jusqu'au jour où l'employeur de Laurent ne supporte plus ses absences et menace de le renvoyer. Il faut trouver un moyen pour eux de continuer à se voir, et la seule solution qu'ils trouvent est de supprimer le mari, devenu trop gênant.
Qu'on ne s'y trompe pas, Thérèse Raquin n'est pas un roman d'amour, ce n'est pas non plus un roman social, ni un roman policier. Pour moi, c'est presque une tragédie grecque. Remettons les choses dans leur contexte, ce livre ne fait pas partie du cycle des Rougon-Macquart, c'est (quasiment..) le premier roman de Zola, et il ne ressemble pas du tout aux autres. Je n'aimais pas trop cet auteur jusqu'à ce que mon professeur de littérature [Monsieur Doumazane, si vous me lisez...], nous parle de ce roman. Je l'ai lu, relu, et relu encore pour vous hier. Zola est ici dans le microcosme, il fait de la psychologie, fort fine d'ailleurs, et s'attache aux personnages plutôt que dans les Rougon, où il veut dépeindre la société à l'échelle macroscopique et où les personnages ne sont plus que des pions. Rappelons-nous La Curée, quand Renée, personnage principal meurt à la toute fin du livre, je vous ai retrouvé le passage ce sont les trois dernières lignes : "L'hiver suivant, lorsque Renée mourut d'une méningite aigüe, ce fut son père qui paya ses dettes. La note de Worms se montait à deux cent cinquante-sept milles francs."- où sont donc les sentiments? De plus un avantage à mon goût énorme dans ce livre-ci c'est qu'il n'est pas encore tombé dans les dérives du naturalisme, désolée pour les amateurs. Je ne comprends pas ce courant, de raconter la vie de tout les jours, c'est la télé réalité, faite livre... Bien sûr, vue la période on peut lire les livres dans un intérêt historique, mais moi l'histoire c'est pas mon truc, je préfère les histoires. Thérèse Raquin ne s'encombre pas de descriptions ennuyeuses de quinze pages, et fait dans l'efficace, dans le tortueux. Ce livre me fait beaucoup penser à Crime et Châtiment de Dostoïevski. Les personnages sont extrêmement bien réfléchis, profonds, et l'analyse résolument moderne. A lire pour tout ceux qui n'ont pas aimé le Zola qu'on leur a fait lire malgré eux au collège ou au lycée, à lire pour tout le monde d'ailleurs, ce roman est un petit bijou.