Mo Hayder amène de supers éléments avec cette vieille maison au rez-de-chaussée condamnée, où les moustiques sont rois, où l'humidité et la moisissure règne, où le bois craque et les portes restent closes. Où l'obscurité n'a pas de fin. Avec ce jardin japonais qui devait être si beau, si entretenu avant, et qui aujourd'hui ressemble à un lieu sauvage, mystérieux, et dangereux. Où le passé a des secrets à révéler.
Et puis, plouf, on passe à autre chose.
Et c'est comme ça à chaque fois : un super élément, et fin de chapitre, on part sur autre chose. Certes on reviendra sur cet élément, il sera révélé un peu plus, mais centimètre par centimètre, au bout d'un moment ça me lasse ce rythme mécanique et fait pour être "haletant".
Mais l'histoire est intéressante. Ce n'est pas si horrible que ça, vu les commentaires parcourus je m'attendais à de l'insoutenable, alors que je les trouve plutôt attachants et très humains. Et avec plein de douceur aussi. Ils me font souvent penser à de petits animaux sauvages qui ne demandent (presque) qu'à être apprivoisés.
Et puis... y'a rien de très original sous le soleil : les horreurs de la guerre, génocide et violences en tous genres, y'a pas vraiment de regard "neuf" porté dessus. Les milieux de Yakusa et hôtesses au Japon, pareil. Les êtres un peu décalés-bizarres par rapport au monde, des solitudes qui s'entrechoquent, finissent par communiquer, puis par s'entendre, voir se "sauver", ce n'est pas amené avec grande originalité.
Bref. Ce n'est pas un livre exceptionnel pour moi. Il respecte plein de codes, et est bien construit (un peu trop bien).
Globalement déçue, parce que Mo Hayder promet plein de trucs, et finalement reste en surface. La partie la plus intéressante est celle de Shi Chongming, son journal dans lequel il raconte l'arrivée de l'invasion, les croyances en l'humanité des soldats, la planque, l'isolation, la faim, l'angoisse, puis la colère. Sauf qu'à la fin, ça va un chouia trop vite : confrontation entre lui et le soldat japonais. Grosse ellipse sur ce qui lui arrive après, vraiment ça manque je trouve.
Et des grosses ellipses y'en a à la pelle sur des trucs qui s'annoncent plus qu'intéressants à développer, ne serait-ce que le personnage principal, phénomène Grey, dont finalement on ne saura pas réellement si elle a un vrai grain, pourquoi elle a été élevée dans une sorte de carcan, ce qu'a été cette vie... sa folie... finalement, que des bribes qui m'ont vraiment laissé sur une impression de creux.
Et le personnage de la Nurse... Ok, fallait un Monstre Mystérieux, mais alors là... elle s'est carrément pas foulé Hayder, il est tellement flou son personnage qu'il en perd complètement sa force au final.
En fait, j'ai l'impression qu'elle a surtout voulu parler du massacre des chinois et de cette violence sadique chez les soldats japonais, et comme elle ne pouvait pas, ne se sentait pas, de faire un vrai essai documentaire...etc... elle a pris le procédé du roman, et du policier en particulier, mais sans trop s'en préoccuper plus que ça.
Un roman très inégal pour moi, avec de bons moments de tensions de suspens d'envie de savoir, et plein de superficialité, de creux, de non-dits qui frustrent et laissent une impression décevante de bâclé.