Tout passe
7.1
Tout passe

livre de Gabriel Josipovici (2006)

«Une pièce.
Il se tient à la fenêtre.
Et une voix dit : Tout passe. Le bien et le mal. La joie et la peine. Tout passe.»

Gabriel Josipovici arrive à créer du silence avec des mots.
«Tout passe» est un texte si épuré qu’il semble être en creux, comme une dépression remplie de la difficulté d’exister, et qui déborde en même temps de la plus grande exigence.

Un homme est seul dans sa maison, face à sa fenêtre, fêlée. Il ne se passe rien dans cette pièce et dans ce texte nus, si ce n’est que cet homme, âgé, vient toucher du doigt les fêlures de sa vie. Le téléphone sonne, les enfants viennent le voir pour s’assurer que leur père va bien, mais c’est comme s’il ne se passait rien. Dans un présent rempli de ces événements vides, effet de la vieillesse ou de la maladie, quelques souvenirs pleins émergent, les histoires d’amour de cet homme aujourd’hui veuf, et les souvenirs de ses enfants, petits, dans un récit qui mêle passé et présent entremêlés comme les éclats de cette bombe à fragmentation qu’est la mémoire.

Le dénuement de l‘être, et en particulier de celui qui se confronte à l’exigence de l’écriture, semble être surmonté quand le narrateur pense littérature, évoque les écrivains ses prédécesseurs dans la solitude. Alors, avec Rabelais qui avec l’imprimerie était devenu le premier à n’écrire que pour lui-même, le récit devient libre, et tout à coup remplit tout l’espace de la page.

Et, curieusement, ce plein est moins dense, plus léger, comme si tout prenait vie avec la littérature.

Gabriel Josipovici est un vrai magicien.
MarianneL
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 1 mai 2013

Critique lue 247 fois

4 j'aime

MarianneL

Écrit par

Critique lue 247 fois

4

D'autres avis sur Tout passe

Du même critique

La Culture du narcissisme
MarianneL
8

Critique de La Culture du narcissisme par MarianneL

Publié initialement en 1979, cet essai passionnant de Christopher Lasch n’est pas du tout une analyse de plus de l’égocentrisme ou de l’égoïsme, mais une étude de la façon dont l’évolution de la...

le 29 déc. 2013

36 j'aime

4

La Fin de l'homme rouge
MarianneL
9

Illusions et désenchantement : L'exil intérieur des Russes après la chute de l'Union Soviétique.

«Quand Gorbatchev est arrivé au pouvoir, nous étions tous fous de joie. On vivait dans des rêves, des illusions. On vidait nos cœurs dans nos cuisines. On voulait une nouvelle Russie… Au bout de...

le 7 déc. 2013

35 j'aime

Culture de masse ou culture populaire ?
MarianneL
8

Un essai court et nécessaire d’un observateur particulièrement lucide des évolutions du capitalisme

«Aujourd’hui il ne suffit plus de transformer le monde ; avant tout il faut le préserver. Ensuite, nous pourrons le transformer, beaucoup, et même d’une façon révolutionnaire. Mais avant tout, nous...

le 24 mai 2013

32 j'aime

4