Serge Brussolo est notamment connu pour son imaginaire hors du commun, dépassant l'entendement et certainement né de ses fantasmes les plus enfouis et d'une éventuelle psychose latente.
Dans ses meilleurs ouvrages, l'écrivain manipule les mots pour nous faire imaginer l'inimaginable, tantôt malsain, tantôt fascinant, souvent les deux à la fois.

Des idées, Brussolo en a à la pelle, il les produit à la seconde dans l'industrie de son cerveau. Une question se pose alors : mais où stocker toutes ces idées ? La réponse tombe sous le sens ! Pourquoi ne pas créer un musée ? Un vrai musée Brussolien, le piège le plus infernal qui soit, l'édifice le plus fascinant ayant existé.
Imaginez un musée dans lequel chacune des oeuvres exposées serait une idée folle de Brussolo, une idée saugrenue matérialisée, incongédiable dans un roman. Une idée mise en cage.

Ce musée existe, et c'est celui qui fascine les héros de cette nouvelle (car c'est une nouvelle, tirée d' "Aussi lourd que le vent"). Comment ne pas être fascinés d'ailleurs, quand Brussolo nous fait le tour du propriétaire, quand il présente ses créations, quand il les entoure de théories, lorsque certaines de ces oeuvres questionnent l'essence même de l'Art.

Oui, car ici Brussolo s'attaque à l'Art. Qu'est-ce ? Qu'est-ce qui rend l'Art fascinant ? Est-ce le mystère, est-ce la résolution, est-ce la bizarrerie, est-ce le réalisme ? A travers les pièces de son gigantesque musée, il pose ces questions, il nous écarquille les yeux devant des idées de génie, il nous fait réfléchir subtilement tout en nous divertissant.
C'est ici la grande force de cet ouvrage, qui nous surprend constamment.

Le problème finalement, c'est que c'est cette partie là qui se révèle à mes yeux la plus passionnante. Bien que l'histoire de nos personnages reste toujours intéressante, voire même palpitante, elle n'en demeure pas moins classique au sens strictement Brussolien du terme (comprenez que Brussolo n'est jamais une lecture "classique"). C'était donc bien dans les passages traitant réellement de l'art que j'étais le plus intrigué, et que je me délectais de chacun des commentaires. J'étais finalement assez déçu que cet aspect se perde quelque peu sur la fin.

Néanmoins, ça n'en reste pas moins une nouvelle de grande qualité, nous entraînant dans les tréfonds de la folie, de la dépression. Nos personnages fuient à travers l'art un monde n'ayant plus aucun sens.

A lire absolument si on aime l'auteur, à conseiller également aux néophytes pouvant facilement être fascinés par cet imaginaire.
GagReathle
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le 21 mai 2013

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