Trois chevaux par Kern Joly
Notre narrateur n'a pas de nom (ou du moins, on ne le connaîtra jamais), seulement une histoire. De cette histoire, il ne reste que les cendres d'une révolution. Les cendres d'un premier amour détruit par une « guerre vagabonde », menée contre la dictature militaire en Argentine. C'est donc après avoir vu Dvora assassinée, celle qu'il avait suivi par amour jusqu'en Argentine, que notre narrateur retourne en Italie, dans sa Calabre natale. Il y apprend que « la vie d'un homme dure autant que celle de trois chevaux ». Une page se tourne : son premier cheval fait désormais également parti des cendres. Pour ce jardinier napolitain, c'est une nouvelle vie qui commence, un nouvel amour également. Celui de Laila, rencontrée dans un bistrot. Mais, « trois chevaux », ce n'est pas une histoire d'amour. C'est l'histoire d'une vie, une histoire d'homme dur, digne. Un homme dont les mots courent sur les branches des plantes qu'il cultive. L'écriture d'Erri De Luca, dépouillée à l'extrême, vient du plus profond de la terre, là où naissent les racines. Les racines, ce sont ces choses simples de la vie : la femme aimée, l'ami, une tomate écrasée baignant dans l'huile d'olive. Erri De Luca fait partie de ces écrivains qui arrivent à vous piquer les yeux en vous parlant de l'épluchure d'un oignon.
Il le dit lui-même, les livres doivent « porter une personne et non pas se faire porter par elle, décharger la journée de son dos, ne pas ajouter leurs propres grammes de papier sur les vertèbres. »... Pari réussi pour ce petit bijou de la littérature italienne contemporaine!
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