Un bonheur insoutenable me faisait de l'oeil depuis son arrivée dans ma pile de livres à lire à Noël.
En un peu plus de 300 pages, Levin nous transporte dans un futur bien (trop) ordonné dans lequel chacun vit en (trop) bonne intelligence et où ne règne que fierté pour la Famille mondiale et volonté de la protéger.
Mais naturellement, l'Homme n'est pas devenu tout doux tour gentil en quelques siècles. Travailler, regarder la télévision et s'envoyer en l'air une fois par semaine, si cela peut paraître normal à certains, n'est pas devenu une routine et un devoir par hasard.


Aidés (surveillés et dirigé/) par Uni ord, la population mondiale est maintenue en bonne santé (droguée), de bonne humeur (re-droguée) et connait à présent le règne de la paix (foutaise) et de l'égalité (re-foutaise) tant espérée par des générations et des générations.


Mais malgré la drogue, malgré la pression sociale, malgré les bonnes âmes charitables voulant "aider" ces malades qui osent penser, les-dits malades sont prêt à bien des choses pour redevenir humains.


Le roman pose dans ce cadre de nombreuses questions intéressantes. L'une d'elle est de savoir ce qui est préférable : une paix des corps et de l'esprit médicamenteuse, ou subir les affres de nos émotions, des conséquences de nos choix, de nos tempérament ?
De plus, à partir de quel moment peut on s'estimer heureux de notre condition et cesser de lutter ? Lorsque l'on a retrouvé ses esprits ? Lorsque l'on peut en profiter pour se griller quelques clopes en bouquinant sans être vu ?
Lorsque l'on devient libre de faire ce que l'on veut au prix de notre égalité et d'un labeur qui ne laye guère ? Ou lorsque l'on détient pouvoir et tranquillité ?
Enfin, en opposant différence et perfection, l'oeuvre de Levin nous pousse à réflechir sur le degré de ressemblance qu'il faut pour se comprendre et vivre en bonne harmonie, et le degré de différence nécessaire pour que nous ne soyons pas de simples rouages inter-changeables.


Tout au long de la vie de Li RM35M4419 dit Copeau pour les "malades", nous explorons les différentes possibilités qui s'offrent à lui, partageant sa quiétude, ses craintes, ses excitations et ses espérances.
Tout au long du livre nous nous demandons ce que nous ferions. Ce que nous aimerions et serions capable de faire. Nous tremblons avec lui, nous réjouissons avec lui et évoluons à mesure que ses combats se poursuivent.


À vrai dire, si je ne devais faire qu'une seule critique négative -et je vais le faire- elle concernerait la scène de viol (non, il n'y a pas d'autres mots) durant sa fuite vers Liberté. Montrer la bestialité de l'homme, d'accord. Montrer l'effet d'une bestialité acquise de courte durée et donc mal maîtrisée, d'accord. Mais un viol n'en reste pas un viol et je ne suis pas réellement convaincu qu'il ait été nécessaire afin de nous dévoiler cette facette de cette nouvelle liberté d'être.
Tout comme la réaction de la jeune femme violée m'a un peu laissé sur les fesses. Comme si un viol pouvait se gérer comme une vilaine insulte. Même si elle avait menacé de le tuer (ça j'en conviens également, c'est un peu moyen) avant qu'il ne l'agresse, le pardon est bien mal amené. Une scène qui n'était donc pas indispensable et qui est bien mal abordée (parce que par les yeux d'un homme dans les années 70 peut être?).
Ceci dit, ce faux pas est le seul de toute l'oeuvre et la force de celle ci l'emporte sur le reste.


Car Un bonheur insoutenable est avant tour cela : un livre qui vous fait réfléchir, qui vous transforme en héros lucide et habile parmi les moutons et distrait intelligemment. Un livre fort qui nous questionne sur ce que nous sommes, sur notre société et sur ce que nous sommes prêt à faire pour atteindre un bonheur réel et partagé.

Créée

le 13 mars 2016

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Gaby Aisthé

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