J’ai entendu Xavier Le Clerc sur France Inter. J’ai vu le sourire de mon libraire qui réceptionnait « Un homme sans titre ». J’ai acheté le livre. Et j’ai très bien fait !
Xavier Le Clerc partage son histoire familiale, depuis l’Algérie jusqu’à la France et à travers elle, celle « de tant d’ouvriers qui ont reconstruit la France d’après-guerre ». Il suscite une réflexion sur l’intégration, la reproduction sociale et l’identité.
Ce livre est d’abord un magnifique hommage à son père.
Né dans une Kabylie pauvre et affamée, il partira en France en 1963 pour y devenir ouvrier sur les chantiers et à l’usine de la Société Métallurgique de Normandie. Père de 9 enfants, il s’est tenu droit, « à l’ombre des hauts fourneaux », pour faire vivre sa famille.
Que faut-il avoir vécu pour « se rouler dans sa peur », terrorisé par « les chiens, les prises électriques et les couteaux » ? Comment rester digne quand on n’a reçu que « l’indifférence que l’on réserve aux cailloux » ? Quelle est la « solitude insondable » de celui qui a « appris à se taire et surtout à ne jamais relever la tête » ? L’orgueil peut-il alors « [cacher] un gouffre » ?
C’est aussi le récit de la trajectoire de l’auteur, de son premier nom, Hamid Aït-Taleb à son identité actuelle, Xavier Charles Le Clerc. Lui qui a reçu la « grammaire du manque » en héritage, prendra un virage nouveau, grâce à la littérature, qui l’a construit et à la France, à qui « je dois tout », écrit-il.
Mais quel est le prix de sa différence ? L’incompréhension, la rupture ou les 2 ?
Un livre profond, pudique, sensible.