Fausse modestie
Fred Vargas s'est déchaînée : un véritable feu d'artifice d'associations d'idées, un festival d'Adamsbergueries. Les personnages se multiplient (le commissaire british, le neveu serbe, les adjoints...
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le 18 mars 2014
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Une rencontre-échange de livres, le temps d'un petit-déjeuner. Elle vient de Suisse et me parle d'auteurs que je ne connais pas; je pose sur la table des livres d'auteurs belges que j'ai envie qu'elle découvre. Et puis, avant de se quitter, elle va dans son sac, en retire un livre dont elle vient d'entamer la lecture, un Fred VARGAS. Je ne connais pas! Elle me le donne. "J'en ai d'autres à lire, tu me le rendras la prochaine fois!" Voilà comment j'ouvre, pour la première fois un VARGAS.
"Un lieu incertain" (J'ai lu, n°9392). J'ouvre et je lis. Je suis pris. J'aime très vite cet Adamsberg, policier hors normes, hors propos, hors tout, sauf compétence et reconnaissance des compétences de chacun des membres de son équipe. Là, je suis séduit, j'aime ce type de personnage! Et puis son ton décalé, sa manière de pratiquer le grand écart en permanence, de penser dans les nuages et de s'enraciner au plus profond du moindre détail par lui seul observé. J'aime cette obsession à faire du lien avec tout: l'ours du salon, le mangeur d'armoire, les pieds découpés et l'araignée qui a piqué son voisin. Et, à côté, j'aime le puits de sciences qu'est Danglard, son collègue et la phobie de ce dernier à passer sous la Manche ou sa maladresse à y amorcer une aventure amoureuse.
La plume de VARGAS est légère, précise, parfois acérée, elle stylise ses personnages, en pleins et déliés. Ils ont tous du caractère, tous une valeur à part entière et quasi égale dans l'avancement de l'histoire. Une vraie écriture de fond qui sert magnifiquement ce genre dit 'superficiel' qu'est le polar. Préjugé que je ne partage pas du tout, le polar ayant, à mes yeux, une vraie place dans les récits qui nous invitent à revisiter notre "petit monde pas toujours joli,joli!".
Et cette fois, de quoi s'agit-il? Fred VARGAS nous entraîne dans un lieu incertain. Avec le charme dérisoire d'une histoire de Vampires à laquelle on ne peut croire, raison oblige! ... mais qu'on suit tout de même avec grand intérêt, l'auteur nous plonge dans ce milieu glauque des histoires de familles, des souffrances ressassées, des injustices aux relents d'éternité, de la vengeance qui donne tout son sens à la vie puisqu'elle veut la mort! Au nom de la Lignée de sang, nourris par les imaginaires collectifs et destructeurs des anciens, pétris du milieu dont ils ne peuvent se dépêtrer, il en est un qui ne peut vivre qu'en cherchant à mettre un point final et glorieux au passé qui le mine et qu'il traîne aux pieds depuis des siècles.
Pour donner un avenir au présent, Adamsberg doit mettre fin au passé! Bien sûr, il y arrivera... mais comment?
Créée
le 6 mai 2015
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