Une fin de journée, à Montmartre, cet Augustin qui m’est cher m’a offert « Un soir au club ». Quelques jours plus tard, je lui écrivais « Lecture en cours. Ce livre est dingue, fou, génialissime. L’histoire, les personnages, le style, l’univers, les thèmes abordés. Merci. Je me délecte. Je suis à la fois avec l’envie impatiente et curieuse de le dévorer d’une traite et celle de ralentir la lecture pour en profiter encore plus. »
« Un soir au club » de Christian Gailly
Simon Nardis était pianiste de jazz. Il avait un style, une « manière de jouer [qui] avait pas mal chamboulé la pratique du piano en jazz ». Puis, il avait cessé de jouer « pour raisons de santé ». Il avait en réalité davantage tourné le dos à un « mélange mortel, mortel pour lui et quelques autres comme lui : nuit, jazz, alcool, drogue, femme, jazz, nuit. ».
Depuis dix ans maintenant, Simon est ingénieur en chauffage industriel. Il est aussi devenu grand amateur de musique classique et vit avec Suzanne une vie sobre et saine, qui semble parfaitement lui convenir.
Mais un train raté, une invitation, un verre et il se laisse « tenter par un piano » et une femme. Une « inspiration toxique », « une minable petite envie de vivre », « un bonheur inquiétant », des « flashs d’intense plaisir » ou bien un air de « laisse-le respirer, laisse-le vivre, laisse-le essayer », une ivresse fulgurante et lucide ?
« Un soir au club », c'est une atmosphère, celle du jazz, du piano, d’un club, un soir : « le son, (…) la lumière rouge, l’odeur du jazz ». Une ambiance qui « swingu[e] amoureusement dans les volutes mineures », dans l’ivresse de la vodka et l’intensité du grand amour. Un voyage musical avec Miles Davis, Chet Baker, Bill Evans que j’ai réécoutés en boucle. Un rythme porté par une écriture composée, articulée, chaloupée, comme un morceau de jazz.
C’est aussi « un certain goût de liberté », une « envie de vivre », une passion qui emporte, un cœur qui a « recommencé d’aimer », des corps désirants. Cela ressemble à un rêve éveillé, celui « de jouir de nouveau d’un piano », de « se dire ça faisait longtemps » et de « se sentir content. »
Qu’est-ce qu’être vivant ? Au prix de quels risques, de quels choix ? Que fait-on de ses rêves les plus fous ? Intuition, audace, lucidité ou soif vitale, quelle est l’étincelle pour oser s’y aventurer ?