une âme soeur
Voilà ce qu'est Murakami pour moi ! Ici encore, malgré le coté un peu rebutant des descriptions détaillées des méandres des lignes de metro et de trains tokioites (il faut souvent aller à la carte...
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le 13 juil. 2016
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La première partie originelle qui constitue maintenant les 3/4 du livre sensibilise sans toutefois être passionnante. Très vite les témoignages des victimes de l'attentat au gaz sarin dans le métro de Tokyo deviennent répétitif. L'auteur voulait apporter un nouvel éclairage différent de celui des médias à l'époque et délaisser la partie dédiée au culte pour se concentrer sur les victimes et mettre en lumière la vie banale de ces gens banals et la façon dont ils ont vécu cet attentat. L'intention est louable mais très vite les détails de la vie de chacun se perdent et ils reprennent leur unique rôle de victime. L'avantage est qu'au moins les évènements s'inscrivent bien dans la tête à force de répétition mais l'ennui ressenti n'en devient que + coupable ("oh putain je commence à me faire chier sur des gens qui racontent des choses atroces, manque de sensibilité", etc.)
Bref les choses sont comme elles sont, ça se laisse lire tout de même.
Comme l'explicite l'auteur en introduction à sa deuxième partie "Le lieu promis" - qui n'était pas initialement partie intégrée au livre - Underground avait été taxé d'incomplétude due à son "unilatéralisme" (étant donné que c'était dédié aux témoignages de victimes). Du coup il y a ajouté cette deuxième partie, entretiens avec des membres ou ex-membres de la secte d'Aum, et c'est là que le livre prend son tournant le plus intéressant.
Les victimes (c'est triste à dire) mais n'était "que" des victimes. Rien dans leur vie ou dans leur présence dans le métro n'avait réellement à être expliqué. Ils étaient là, on peut peindre leur vie autour pour déplorer cette tragédie, pointer du doigt le manque d'organisation des autorités et hôpitaux pour faire face à ce genre de tragédie, etc, mais il n'y a rien à comprendre à proprement parler. Quand bien même on dénote des problèmes dans la gestion de cette crise, c'est pas un témoignage de victime qui mènera une réflexion sur comment améliorer quoi que ce soit pour faire face plus efficacement à un attentat dans les hôpitaux, on pointera le problème, jugera de l'extérieur que ça n'aura pas été efficace mais vu qu'on a aucune idée de comment ça s'est passé pour toutes les personnes "en charge de faire face" ça restera stérile (même s'il y a eu un témoignage de médecin). Du coup il n'y aura que des plaintes, comme si on pouvait leur reprocher d'avoir été dépassé par les évènements, que dans un pays qui n'y est pas habitué c'était anormal et répréhensible d'avoir échoué en ça.
ENFIN BREF, a contrario, en s'intéressant aux membres et anciens-membres d'Aum, on est plongés à l'intérieur d'un système où là il y a des choses à comprendre. Murakami, qui laissait les victimes s'exprimer en les menant par de brèves questions générales, a cette fois-ci été plus actif en rebondissant sur ce qui était dit, demandant des précisions et permis du coup de nourrir plus de réflexions.
Chaque membre est différent et voit les choses différemment. Leur point commun étant une remise en cause de leur place au sein de la société, d'une envie de + spirituellement (ce qui est sûrement un point commun à toute personne rejoignant un quelconque groupuscule). Ça s'illustre avec leurs mots, on comprend mieux le fonctionnement en interne de la secte et on peut suivre leur raisonnement. De même, avoir leur point de vue sur la secte après les évènements est intéressant puisque la plupart n'était pas dans le secret de l'attaque au sarin.
Du coup les témoignages dépeignent leurs premiers pas dans la secte, comment ils jonglaient avec leur vie, comment et pourquoi certains devenaient des "Samanas" (grade supérieur impliquant une séparation avec leurs attachements matériels et affectifs : famille, travail, amis), comment ont-ils fait face à leurs doutes (si doutes il y avait), ont-ils senti la tournure violente prise par la secte, comment se passe leur réinsertion, etc.
En ce qui concerne l'épilogue de Murakami sur son point de vue par rapport à ces témoignages, je suis mitigée. D'un côté quand il en parle on a l'impression qu'il a simulé l'intérêt qu'il leur portait et qu'en réalité il les regarde avec dédain "sont complètement illuminés, je les ai fait parlé pour voir l'étendue de leur connerie, pas pour les comprendre réellement" et d'un autre côté il les démystifie et pointe le fait que ce ne sont pas d'étranges créatures. Sans compter que son incompréhension associée à sa curiosité a sans doute participé à nourrir la conversation en posant beaucoup de questions.
Une parole malheureuse a fini de me laisser perplexe "Afin qu'il n'y ait pas un deuxième, puis un troisième Ikuo Hayashi, il est crucial que notre société prenne le temps de réfléchir aux questions que nous pose cette attaque tragique". Il faudrait préciser ce qu'il entend par là, parce qu'à l'issue de ma lecture des témoignages et du passif de cette personne, mon impression générale a été que le fait que la société "ne sache pas prendre en charge" ce genre de personnes qui se sentent à part était le problème, pas que Ikuo Hayashi soit qui il est. C'est peut-être qu'une question de formulation qui vaut pas la peine qu'on se prenne la tête dessus mais une deuxième, voire une troisième personne serait bienvenue, mais il faudrait justement qu'elle soit reçue et pas délaissée jusqu'à ce qu'elle se trouve une place dans une organisation à laquelle il se vouera. Donc "Afin qu'une personne comme Ikuo Hayashi ne se retrouve pas dévoué au-delà de la raison à la seule organisation qui l'a acceptée, il est crucial que notre société [...]"
Aussi, Murakami note que toutes les personnes interrogées ayant fait parti du culte et l'ayant quitté avec + ou - d'aversion envers la secte ne regrettent pas la partie de leur vie qui a été dédié à cette secte, de même que certains préceptes font toujours sens pour eux et sont toujours louables. Cela lui cause d'ailleurs une certaine incompréhension et il en parle comme si c'était un lavage de cerveau ancré en eux. Ça fini de le décrédibiliser à mes yeux. Lui qui voulait éviter l'écueil qu'il reprochait aux médias de compartimenter "bon et mauvais", qu'il trouve ça étonnant que tout ne soit pas à jeter selon des personnes virulentes envers Aum et Asahara est incompréhensible pour moi. J'ai l'impression de ne pas avoir lu les mêmes témoignages qu'il a retranscrit.
Au-delà de ça les témoignages se suffisant à eux-mêmes on peut passer outre.
Ma note est surtout fonction de la deuxième partie.
Créée
le 17 juil. 2016
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