Afrique du Sud, 1976. Les émeutes de Soweto - un township de Johannesbourg réservé aux Noirs - éclatent lorsque le gouvernement impose l'enseignement obligatoire en langue afrikaans. Comme des centaines d'autres manifestants, Jonathan Ngubene, 15 ans, est arrêté par les forces de l'ordre et emprisonné. Dans sa cellule à John Vorster Square, le quartier général de la police, le jeune activiste est torturé, et meurt de ses blessures. Quand la Section spéciale fournit à ses parents une version officielle de mort naturelle, et refuse en outre de leur restituer le corps, Gordon et Emily se tournent vers Benjamin du Toit. Respectable Afrikaner, ce professeur de l'enseignement secondaire emploie occasionnellement Gordon comme jardinier, et payait même les frais de scolarité de Jonathan. Ben accepte d'apporter son aide, mais quand Gordon est à son tour emprisonné, puis retrouvé soi-disant pendu dans sa cellule quelques semaines plus tard, sa quête devient toute personnelle. Pour briser l'inaltérable façade de respectabilité présentée par les officiers de police responsables, l'enseignant se met à rassembler indications et bribes de preuves, aidé par l'avocat roublard Dan Levinson, l'avisée journaliste Melanie Bruwer, et Stanley, un exubérant chauffeur noir ami de Gordon. Rapidement, Ben réalise qu'il devient l'objet de l'attention soutenue de la Section spéciale, et notamment de l'inquiétant capitaine Stolz...
L'individu contre le système - peut-être pas complètement totalitaire en l'occurrence, mais certainement autoritaire et inégalitaire - voilà l'objet d'Une Saison blanche et sèche, le roman qui fit la renommée de son auteur André Brink à l'international. Écrit en afrikaans, il fut publié en 1979 à Londres, aussitôt interdit en Afrique du Sud, et traduit en 1980 en France où il remporta le prix Médicis étranger. À travers la quête de vérité et de justice menée par un Blanc, boer de surcroît, pour faire toute la lumière sur les assassinats perpétrés par les autorités de son propre peuple, c'est à une description glaçante de l'apartheid que le lecteur est confronté. La politique de « développement séparé », comme l'appelaient hypocritement ses instigateurs d'alors, est présentée dans toute son iniquité à travers les pratiques détestables utilisées par les officiers de la section spéciale de la police sud-africaine. Face à cette oppression organisée des Noirs, la révolte personnelle de Ben fait longtemps figure de solution viable, mais à la manière de 1984 l'individu finit, irrémédiablement, par être muselé par le système qu'il affronte. Peu à peu, Ben perd la confiance de ses proches - famille, amis, collègues. Puis, plus tragiquement, celle des Noirs dont il défend pourtant la cause, parce qu'il est - et reste - un Blanc. Évitant le happy end facile auquel on est poussé à croire, le livre se conclut de façon bien amère, pour le héros comme pour le lecteur.
Trente-cinq ans après sa publication, Une Saison blanche et sèche reste une lecture marquante. Et d'actualité également : même si l'Afrique du Sud n'est plus tellement concernée par ce genre de politique ségrégationniste, d'autres pays ont pris le relais...