Je n'ai lu que la première partie des "Visions de Cody" pour une raison simple : l'édition Quarto de Gallimard ne propose que cette partie du livre maudit de Kerouac, refusé quasiment par toutes les maisons d'édition malgré ses succès précédents.
Depuis, bien évidemment, le livre entier et ses quelques 736 pages sont disponibles partout, mais je ne regrette pas de m'être limité à cette version "abrégée" publiée par Gallimard (et, si je ne me trompe pas, validée par Kerouac lui-même).
Pourquoi ?
Car cette première partie est faite d'esquisses, relativement hétérogènes, de New York. Les descriptions s'étalent sur des pages, entrecoupées de fulgurances jouissives (sur la masturbation, sur la religion...), et sont souvent le portraits d'américains. On imagine bien Kerouac, planqué dans la rue, un petit carnet en main, en train de prendre des notes sur des passants ou des vieux assis à la terrasse d'un café.
Ces descriptions – des tranches de vies sorties souvent de tout contexte – sont magistrales tant elles font toucher du bout des doigts ce qu'est l'Amérique. Elles transpirent l'humanisme et l'empathie de l'auteur, que l'on sent se fondre dans la peau des personnages qu'il dépeint.
Toutefois, je les ai trouvées – au premier abord – plutôt difficiles d'accès. Une lecture lente, concentrée, est nécessaire pour les assimiler et les apprécier. Une lecture lente justement favorisée par la version abrégée (comprenant une centaine de pages contre les – rédhibitoires – 736 pages de la version d'origine).
De plus, la troisième partie absente de la version abrégée – décrite comme la plus longue et monotone – est composée de retranscriptions de bandes d'enregistrements de conversations : des dialogues interminables, allongés par la weed et formant plus un document brut qu'une œuvre littéraire (passionnant pour les aficionados ou les universitaires, mais contournables pour les néophytes comme moi).
J'apprécie Kerouac pour avoir écrit, selon ses propres termes, une sorte de Recherche du temps perdu mais au pas de course... Et c'est exactement ce que m'a offert cette version abrégée.
A lire ! A apprécier ! A méditer ! Et surtout, continuer dans les livres constituant la fameuse Légende de Duluoz !