Quand un écrivain se fait rare, ne publie pas, les éditeurs ont tendance à demander un ouvrage de commande intermédiaire pour faire patienter les lecteurs.White paraît être de cette veine et être pour Ellis, une justification à priori lucrative (à l’image de la comédie musicale d’American Psycho) avant la publication d’une vraie œuvre aboutie.Ce moment adviendra-t-il tant Brett Easton Ellis ne se considère vraiment plus en phase avec cette époque de l’image, des réseaux sociaux et des déclarations nauséabondes orientées? En soi, lire White permet au lecteur de voir comment l’écrivain est venu à l’écriture, c’est à dire par le biais de sa cinéphilie eighties ( la plus aboutie et évocatrice selon lui).Un moment intéressant à lire contrebalancé par des évocations de films mineurs ou de shows américains ( dont les acteurs ou leurs déboires indiffèrent le lecteur hors USA).Dans ce livre, chaque moment d’intérêt est malheureusement noyé dans le futile présent pour faire du remplissage. Le talent de conteur et le sens d’observation d’Ellis aurait permis d’éviter les passages emmerdants.Le fait que l’écrivain homosexuel sorte avec des plus jeunes hommes,qu’il voit Kanye West de temps à autre,et que l’industrie du spectacle américaine a réagi plus ou moins habilement à l’élection de Trump sont de purs moments figuratifs dont la portée ne saute pas aux yeux.Tout ce que semble dire l’écrivain,aujourd’hui âgé de cinquante cinq ans, c’est qu’avant c’était mieux.Un constat logique expliquant sa lassitude et son ras-le-bol du monde actuel. Mais en s’exposant dans cette autobiographie en demi-teinte, Ellis a-t-il un intérêt à se dévoiler sur ses opinions personnelles apparentes? Rien n’est moins sûr et ce tant attendu White ,dont le découpage assez hasardeux laisse perplexe, peut-il retarder son retour vraiment littéraire? Plus de questions en suspens que d’intentions limpides. Il y a des moments dans la lecture où vous n’avancez pas car ce dont il est question est anecdotique ou inintéressant.Il y en a d’autres où l’interêt reprend de la vigueur et vous avez envie de poursuivre.En ménageant ses effets,en hiérarchisant ses expositions, Ellis aurait éludé ce côté mi figue mi raisin déservant White pour un « essai » plus mémorable.