Faible écho d'un monde disparu.

Typiquement le livre dont se débarrassent les bibliothèques, qui fait poussiéreux, et qui pourtant a des choses à nous offrir.

Les deux auteurs, Michel Huteau et Patrick bernard, ont parcouru en bus les provinces du Yunnan et du Guizhou, au sud de la Chine, au contact avec Laos, Cambodge et Vietnam. La diversité de paysages de ces régions est frappante : les fameux pains de sucre nimbés de brouillards, les collines sculptés par les rizières, les vallées du Mekong et du Sakwen, la forêt tropicale du Xishuangbanna, les contreforts de l'Himalaya, les plateaux calcaires encaissés, aux mille cascades...

Mais le sujet principal du livre concerne les minorités qui vivent dans ces différentes régions reculées. Et de ce point de vue, avant le nouvel impérialisme de Xi Jinping qui nie ces minorités et les sinise ou les folklorise à marche forcée, on a là un témoignage de première main sur les restes de ces cultures avant qu'elles n'arrivent à un point de bascule. Et le livre en est parfaitement conscient.

Apparemment le voyage s'est accompagné de la réalisation d'un film documentaire, Patrick Bernard étant aussi producteur. On ne peut qu'être nostalgique de ce monde de l'édition française tiers-mondiste qui était capable d'aller visiter des endroits reculés pour les amener à nous, grand public. Aujourd'hui réaliser un tel reportage serait impensable : un garde communiste suivrait le moindre de vos déplacements de bout en bout.

Le texte est hélas décevant. Il y a certes une recension précise des différentes populations (et Dieu sait que l'on s'y perd), mais elles sont inégalement traités (avec la part belle aux Yin et aux Miao). Il n'y a pas de bibliographie, et la carte donnée en début d'ouvrage ne place pas les minorités, ce qui aurait été utile. Les courts chapitres, passé le chapitre premier qui retrace à grands traits l'histoire de la Chine jusqu'à Deng Xiaoping, recensent par thèmes des impressions de voyage, sans chronologie ou cohérence géographique. Et l'on tombe (à de rares moments heureusement) dans un orientalisme qui ne cache pas ses fantasmes sur les princesses orientales si gracieuses.

Au reste, la part belle est faite aux photographies, notamment aux costumes et aux traditions, avec ces coiffes traditionnelles si fascinantes. J'aime beaucoup.

Ce livre n'est donc pas sans reproches, mais ses photographies sont fort belles et le sujet qu'il traite, certes de manière partielle, est touchant car cette culture des minorités, déjà en danger à l'époque, soit n'a pas survécu au régime actuel, soit s'est disneylandisée.

Ne négligez pas les fonds des vieilles médiathèques !