https://www.youtube.com/watch?v=N0P26QS6t2Q
Le profane intrigué se demandera jusqu'à quel point l'artiste prend au sérieux ce qui pour lui devrait être le sujet le plus intéressant et le plus grave et d'ailleurs semble l'être. Jusqu'à quel point est-il sérieux de lui-même ? Quelle est la part du jeu, de la mascarade, de la bouffonnerie transcendante ? Si la question était absolument infondée, comment ce grand maître du théâtre musical aurait-il pu s'affubler de ce sobriquet ironique dans l'instant où il écrivait son œuvre la plus solennelle et sacrée ? Mon doute, mon souci et ma crainte allèrent même plus loin et dans le secret de mon cœur je m'interrogeais sur le caractère légitime de son activité, sur le droit qu'il avait entre tous ses contemporains de se plonger dans cette sphère où il cherchait à réaliser une recréation par les moyens les plus extrêmes et les plus développés. Bref, je soupçonnais avec tendresse et inquiétude un esthétisme qui mettait douloureusement en question le minimum de logique que j'attribuais à ce chanteur, selon laquelle la contrepartie destinée à assurer la relève de la culture bourgeoise ne serait pas la barbarie mais le collectivisme.
"Au mot de Goethe : « l'art s'occupe de ce qui est difficile et bon », il rétorquait que le genre léger aussi est difficile quand il est bon et qu'il peut l'être comme le genre sérieux." Thomas Mann encore et toujours, mais plus pour très longtemps.