Drive par Johnny B

J'ai dû partir 3 fois dans ma vie en laissant derrière ceux que j'aimais. Pas par méchanceté, loin de là, mais bien parce que je n'avais pas le choix et que ce chapitre était terminé. La première fut certes déchirante mais en rien comparable aux deux autres départs. Il s'agissait de mes parents à un âge logique. Donc, avec une certaine nostalgie puis avec les responsabilités qui viennent avec cet épisode. Malgré un pincement au coeur, je continuais ma route et mes parents commençaient une nouvelle vie. Presque 20 années plus tard, ce n'était pas la même histoire qui allait se produire et c'est vraiment là que la chanson prend tout son sens...

Une séparation dans mon couple arriva et laissa quelques séquelles indélébiles sur un coeur passablement amoché. A dire vrai, il fut un moment où je vomissais littéralement ma douleur. Peu importe ce que l'autre dans le couple invente comme histoire pour obtenir le beau rôle, personne ne s'en sort indemne. En ce qui me concerne, étant a la base hypersensible, je vivais une situation difficile à décrire. Il y avait un flottement de pensée, comme si c'était une sorte de rêve et une douleur reliée à l'anticipation. Je savais pertinemment que bientôt j'allais devoir dire au revoir à mes deux filles pour aller vivre ailleurs. Cette simple image me torturait et encore aujourd'hui, je revois cet instant précis dans ma tête. Il s'agissait bel et bien d'un adieu à la vie d'avant. Mes collègues pouvaient même percevoir (malgré le déluge inhérent à l'emploi en question qui consistait à nettoyer au boyau de la machinerie) mes larmes à travers des yeux rougis qui se cachaient tant bien que mal sous cette pluie qui coulait à flot tout autour. Je comprenais ce que voulait dire douleur lancinante. Ca n'allait pas bien. Et curieusement, c'est cette chanson qui me trottait dans la tête. Qui allait vous border le soir? Qui allait vous faire un câlin le matin ( oui, il y avait la mère mais bon...). Qui...

Puis, autre femme, autre moeurs. Environ 4 ans plus tard, c'est mon petit bonhomme que je quittais, passant de tous les jours à presque plus. Je le vois encore, assis sur sa chaise haute, ne comprenant pas vraiment les enjeux dans lesquels nous tombions pour des années à venir. Qui te chatouillera le ventre comme je le faisais ? Qui flattera ta tête comme j'en avais l'habitude ? Qui allait retenir ses larmes en partant...

J'interprète donc cette chanson comme un certain adieu, un questionnement sur la suite après un départ. Ces petites routines qui nous securisaient et que l'on a prit pour acquises. Et lorsqu'il s'agit d'enfants, qui expliquera les choses telles que moi, je voudrais les expliquer. Certains voient celui qui part comme étant le méchant et pour qui c'est facile. En effet, les responsabilités sont moindres cependant la tristesse, elle, fait son œuvre telle une perceuse dans le coeur. Il faut d'ailleurs souligner certains comportements inhérents à ma peine. Lors de ces séparations 2 accidents de voitures graves ont eut lieu. Une perte de connaissance ( évanouissement) et une tentative de suicide ont suivi. Alors ceux qui donnent le role du salaud à celui qui part devraient tenir compte de ces données. La morale de l'histoire devient alors " si tu ne sais pas de quoi tu parles, fermes ta putain de grande gueule ".

Cette pièce est devenue un classique des années 80. Avec raison, à mon avis, pour une texture unique et une ambiance d'au revoir qui traverse les âges. Qui te raccompagnera à la maison ce soir ? Je deviens triste de ne pas le savoir. L'homme continue sa vie. Le père, lui, se posera toujours ce genre de questions. Même si les enfants sont grands...