L'ombre du héros...

Ritchie Sambora est surtout connu pour son rôle d'arrière plan dans le groupe Bon Jovi. Et, pour être honnête, je n'aimais pas tellement ce groupe. Moi, ce que j'aimais, c'était bien plus la touche virtuose de Ritchie. Un grand guitariste qui vivait dans l'ombre d'une vedette sans être reconnu à sa juste valeur. Autant dire que je me suis identifié a lui. Pourquoi? Je sais ce que je vaux, toutefois, je n'ai aucune putain d'idée ou l'appliquer. Comme sa carrière solo qui n'a pas tellement levé...

Cette chanson est d'abord et avant tout un bel exemple du génie incompris. Jamais, même, Bon Jovi n'a réussi à faire dans l'émotion autant que cette piste peut le faire. Le groupe allait plutôt dans le moelleux et c'est cette différence qui me tapait sur les nerfs au point de bifurquer dans le métal. Sauf pour Ritchie. Et aussi pour le petit chefs d'œuvre qu' il a créé avec cette chanson. Parce qu' aussitôt entendu, l'air demeure dans la tête et devient une sorte d'hommage.

Cet hommage, il est dirigé vers mon père. Nous ne sommes pas des gens très démonstratifs. Pas de grands élans, pas une grande vie. Mais on sait qu'on s'aime du plus profond de notre cœur. Quand tout va mal, on se raconte nos vies chaque mercredi. Tant mieux si ça va bien mais on demeure suspicieux si c'est le cas. Peur d'avoir une tuile sur la gueule au moment où on esquissera un sourire. Génétiquement conçu comme ça. Ça nous fait bien chier mais, malgré bon nombre de Médocs, cette nature fait partie de notre personnalité. Cependant, il a un avantage sur moi. Lui, il représente une sécurité pour son enfant. Pas moi,..

Du coup, j'ai cette tristesse silencieuse qui me poursuit inlassablement. Peur de le perdre dans un avenir rapproché et de tomber comme une épave qui s'échoue sur le bord de la mer. Elle sera où ma sécurité alors. Celle que je n'ai pas su offrir a mes propres enfants. Bien entendu, pour eux, certaine fois, j'ai pu les sécuriser. Mais dans les moments où je me devais de faire appliquer ma force envers la menace, j'étais probablement, encore, prit dans ma cervelle et mes chimères inutilement complexes. Alors, je ferai quoi quand il partira. Car, si je suis disponible pour mes enfants, c'est parce qu'en arrière, lui, il m'aide a avancer...

Si bien que je juge assez sévèrement ma propre mort. Quand je devrai faire le deuil de celui-ci, mathématiquement, je perdrai environ le quart de mon coeur. Par contre, j'aurai aussi des souvenirs, des conseils, des moments a me remémorer concernant notre relation. Un héritage immense laissé par un homme, certes, imparfait, toutefois, détenant un cœur immense.

Voilà donc d'où vient ma nature taciturne. L'inutilité. Je ne représente pas une sécurité pour mes enfants ( j'ai d'ailleurs quelques baffes a mettre a certaines personnes qui les ont fait souffrir...) et, je ne leur laisse presque rien, sinon quelques écrits, dispersés un peu partout. Qu'est ce qu'ils en auront a faire de ces textes? De quoi se souviendront ils une fois que je serai parti? Pourquoi m'a t-on conçu de la sorte? Tel un fantôme qui erre sans réel objectif...

Alors, la question demeure. Du haut de mon égo, je tombe si je me compare a mon père. Du haut de mon coeur, j'anticipe son départ avec une frayeur douloureuse. Et du haut de mon quotidien, je sais que je ne serai jamais un héros pour mes enfants comme il a pu être le mien... Donc, oui, il m'arrive parfois de penser qu'il serait préférable pour moi de partir avant lui. Au moins, quand on part trop tôt, il y a ce sentiment d'injustice qui règne et qui inspire le respect.

Lui, héros dans l'ombre. Moi caché dans l'ombre. Ayant mené une vie de fantôme, il sera naturel que l'on m'oublie. Et ce sera correct. Je l'aurai bien cherché en allant toujours me terrer dans ma grotte pour fuir le monde qui m'entoure. On a ce que l'on mérite. C'est pourquoi je lui fait cet hommage. Il le mérite.

Bien plus...que moi.