Au départ...

Quand je partirai, mes enfants auront beaucoup de questions concernant leur père. Comment il était petit, de quelle couleur était véritablement son coeur même s'il se plaisait à le décrire comme étant gris. Est ce qu'il nous aimait, et avec quelle intensité au juste . J'ai assez connu le mien pour me faire un tableau de lui et de la grandeur de son coeur. Un ours qui a fait des provisions pour l'hiver et qui finit par en donner le 3/4 à sa progéniture qui ressemble à la cigale même en travaillant comme des fourmis...

Ils pourront lire ce que je lègue dans des livres, chansons et critiques de toutes sortes afin de se faire une idée plus globale de l'amour que je leur portais même au fin fond de mes chimères lointaines. Bien entendu, je prêche pour ma paroisse en écrivant ceci puisque je ne montre pas la grisaille qui me caractérise face à la vie. En effet, j'ai pu être une vraie merde à leurs yeux par moment. Ne serait-ce qu'en étant séparé de leur mère. Moi, j'ai connu la famille nucléaire avec des parents étant demeurés ensembles. Eux ne le connaîtront jamais. Et j'ai beau eu dire que j'avais fait mon possible, il n'en demeure pas moins qu'au niveau amoureux, j'étais loin d'être parfait. Je choisi maintenant d'être seul justement parce que connais mes fissures émotionnelles. Et j'aime trop la femme pour lui imposer une relation avec moi. Comme si je contaminais ma compagne avec la noirceur de mes pensées et assombrissant le paysage jusqu'à la rupture logique. Moi aussi , je suis devenu un ours. Caché dans ma grotte pour éviter de faire du mal a ceux que j'aime...

Pourtant, il y a une énorme contradiction au niveau de mes sentiments. Autant, je peux être distant lorsqu'on regarde la scène de haut. Autant, mes pensées, lorsqu'elles ne sont pas axées sur le devoir( travail, finance, etc...) sont toutes, sans exception, en lien avec ceux que j'aime. Et même de manière incessante. Que fait mon fils présentement, comment va ma plus jeune, ma plus grande est elle heureuse en ce moment ? Le vide dans mon coeur est toujours rempli par une image de mes enfants. Ce sont eux la couleur qui recouvre un coeur solitaire comme le mien. D'accord, mais la chanson la dedans ?

Oublions les paroles. Je ne parle ici que de l'énergie, l'émotion. Cette sensibilité vocale arrive à faire vibrer la corde espoir qui me fait tant défaut. Pas longtemps. Le temps d'écouter le titre. Ensuite, inévitablement, je retourne dans ma vie de paumé hypersensible qui espère toujours qu'on le croira sur parole au dernier moment de son existence quand je dirai je t'aime pour la dernière fois. Qu'ils croiront que mon dernier souffle sera pour eux et personne d'autre.

Et quand ce moment arrivera ( je crains malheureusement que ce ne soit assez tôt vu l'autodestruction mentale et corporelle qui sévit depuis autant d'années) je souhaite seulement une chose concernant cette simple chanson. Juste l'écouter et se laisser transporter par l'énergie qui en découle. Prendre le temps de se concentrer sur l'interlude médiane . Se laisser aller au trémolo du chanteur afin de découvrir la couleur de mon amour pour eux. Parce que c'est précisément avec cette sensibilité que je les aimais. Cette couleur particulière. Cette insistance vocale douce amère. Plaintive et donneuse d'espoir simultanément. Et s'ils comprennent adéquatement ce que j'essaie de traduire émotionnellement avec cette chanson, je pourrai partir...

Le coeur en paix...