Goldman est un homme en or si vous me passez le jeu de mot.
Dans son oeuvre - prit dans son sens elargi- et avec ses mots comme ses notes, il touche l'universel.
Chaque chanson contient donc une potentialité que chacun peut actualiser.
Chez Jean-Jacques Goldman comme ailleurs, peut-etre même plus qu'ailleurs, les "je" sont autant de "moi" qui s'ignorent -ou non- au regard -à l'écoute- des auditeurs...
Il changeait la vie constitue une démonstration assez exemplaire de cette constante.
Deux individus sont définis en premiers mots par leurs métiers. Un manuel, un intellectuel.
Champ large ratissé, tout le monde se projette.
Le troisième est artiste, musicien qui plus est.
Trois "il" pour des milles et des cents de "je".
Corroborant la possible projection de tous, le choix des mots n'est évidemment pas anodin, le cordonnier n'a "rien de particulier", il habite partout et nulle part, le passeur de savoir n'est qu'un "simple" professeur et cætera.
Le temps et particulièrement le quotidien qui permet de mettre en exergue son inexorable est toujours signifiant chez Goldman et Il changeait la vie ne fait pas exception. Ici, le temps -qui ne fait rien à l'affaire et pourtant fait tout- est celui de la répétition, de l'objectif réitéré au cours de la vie.
La mélodie du refrain qui répète un même motif descendant en le déclinant accompagne un texte qui peut résumer sans restreindre le travail du chanteur. Les protagonistes anonymes de ce titre mettent, à la manière du non moins anonyme Jean-Jacques Goldman, du temps, du talent et du cœur à l'ouvrage.
Artiste plébiscité, je ne peux que me réjouir de cette sollicitation, Goldman a la recette pour parler, au singulier, en évoquant l'Homme, sans en avoir l'air, et en ayant les airs.
Il est mû par un amour pour ceux qu'il dépeint et à qui il rend hommage en musique, cet amour explique en partie son succès et la réciprocité de l'affection des français pour celui qui, à sa façon, changeait la vie.