IAM est désormais passé maître dans la récupération par différentes couches sociales. Ecouté d'abord par les jeunes issus de milieux défavorisés, marseillais, le groupe d'Akhenaton peut désormais se targuer d'être commenté par les bobos comme moi ou de se voir régulièrement dans les articles de Konbini, au même titre que Wu-Tang ou autre Biggie.
Et à juste titre, car contrairement à la majorité des groupes de rap français (mea culpa je n'en connais que quelques uns qui retiennent mon attention...), IAM joue clairement dans le domaine de la poésie. Proust a inventé le récit poétique, IAM perpétue cette tradition en offrant, avec l'Empire du côté obscur, un potentiel littéraire impressionnant.
Dans ce morceau, le groupe s'adresse à un "tu" imaginaire, vaguement une femme ("idiote il est trop tard, tu appartiens désormais..."), en tout cas on a l'impression qu'il s'agit de l'auditeur. Shurik'n et Akhenaton deviennent des sujets du "sinistre et sombre seigneur vêtu de noir", et préviennent de l'invasion du monde par l'Empire du côté obscur. Derrière le rythme toujours aussi maîtrisé et les quelques incursions de dialogues de Star Wars, je m'intéresserai surtout aux paroles, qui, pour moi, sont le pilier de ce morceau.
Je pense qu'il faut attendre le milieu du couplet d'Akhenaton pour se rendre compte réellement du propos de ce morceau : le "Jean-Claude Gaudin Skywalker" qui retenait mon attention quand je l'écoutais petit. Le maire de Marseille serait donc du côté du bien, tandis que les membres d'IAM du côté du mal ? Du côté OBSCUR plutôt. Car c'est un morceau éminemment politique. Ce qu'IAM cherche à montrer derrière cette énorme métaphore de l'Empire du côté obscur,c'est la déferlante de l'Art 2 rue comme diraient les collègues de la FF, représenté par les collectifs issus de l'immigration, et donc pour la plupart noirs ou métis. Ainsi, ce côté obscur, qui au départ représente le mal, et donc dans l'inconscient collectif n'appartient à rien de recommandable, devient une fierté, un sujet d'audace et de combat pour IAM. Le côté obscur, c'est le paradoxe d'un préjugé que le noir ne renfermerait que la mort, le mal. Mais ne peut-on "s'apercevoir que l'espoir émerge du noir" ? IAM s'adresse au tout un chacun, afin de leur montrer que cette tentation du côté obscur qu'on retrouve dans les films Star Wars est aussi forte dans le rap français, et ne représente pas forcément un mal. Ce n'est qu'une question de point de vue. Si le bien est représenté par cette bureaucratie corrompue, l'espoir peut bien émerger du noir !
Très bon titre, qui mériterait des analyses bien plus approfondies.