Le bruit des cygnes

Nous sommes quelques uns à penser que Jean Sibelius est le plus hardi symphoniste depuis Beethoven. Dès sa première symphonie, il suffit à l'auteur de quelques rares mesures pour établir un climat sonore immédiatement reconnaissable et à nul autre pareil.

J'aime fanatiquement les sept symphonies mais, comme beaucoup, même si l'extraordinaire fluidité de la Septième, en un seul mouvement, me fascine, j'ai tendance à éprouver une légère préférence pour la Cinquième.

Après la Quatrième, œuvre incroyablement novatrice, qui prenait l'auditeur sans ménagement en fondant presque tout son discours sur l'intervalle dissonant par excellence, le triton, Sibelius revient avec la Cinquième à une démarche moins austère et plus immédiatement séduisante.

Cette œuvre est, sans aucun doute, celle qui possède la fin la plus énigmatique de toute l'histoire de la musique symphonique. Que signifient ces six accords, détachés et inégalement espacés ? Sont-ce les coups de Mjölnir, le marteau du Dieu Thor, luttant contre les forces hostiles ? Est-ce seulement, après de graves inquiétudes de santé, une simple affirmation de confiance retrouvée en la vie et en la puissance créatrice ?

Beaucoup de critiques musicaux limitent leur analyse des interprétations à une vérification que ces fameux accords sont correctement espacés, puisque certains chefs, et des plus grands, Karajan par exemple, qui a gravé plusieurs versions sublimes et d'anthologie, ne respectent pas la mesure.

Ne faisons pas comme eux. Laissons la magie opérer. Dans une discographie pourtant très riche, Bernstein s'impose comme l'un des plus grands interprètes de Sibelius de tous les temps :
https://www.youtube.com/watch?v=dACRUFfmMeo&fbclid=IwAR02QUDC-ma-XLeqm_Oyrpcr2YeTimr0TgnxBIdxdY2BOpsI9xntBPgpAgw