Franz Liszt est un homme très respectable et sa virtuosité légendaire seule permet justifier sa place au panthéon des pianistes. Il savait tout faire, tout imiter, et ne s'en cachait pas. D'où son style grandiose contrastant avec le magnifique expressionnisme bien faible et bien charmant du cher Chopin. Malheureusement sa technique irréprochable empoisonne le fond de la majorités de ses œuvres. Trop occupé à faire je-ne-sais-quelle pirouette stylistique extravagante, il oublie le sens du mot "mélodie" et ses compositions revêtent un teint fade, une sorte de goût artificiel. J'ai bien essayé les interminables "Années de Pèlerinages", mais non, Liszt dans son impressionnisme omniprésent a une foutue incapacité à transmettre des émotions, quelles qu'elles soient, et on s'emmerde ferme.
Mais dans tout ça, il y a les exceptions. Et quelles putains d'exceptions !
Dans les plus évidentes, on citera le Liebestraüme, où il imite avec succès le style de Chopin, tout en rajoutant sa petite touche. On citera aussi "La Campanella" où il imite avec succès Paganini, ou encore le "Mazeppa" où il imite avec succès Franz Liszt lui-même. Et surtout, et surtout, cette œuvre, qui est le plus grand chef d’œuvre qu'ai pu connaître le genre du poème symphonique.
Ici, l'homme imité est Berlioz, et plus particulièrement "Songe d'une Nuit au Sabbat" (Je respecte la Symphonie Fantastique pour les influences que son caractère innovateur a pu susciter, mais elle me fait vraiment pas sauter au plafond, hein...). Cependant ici, Liszt va bien plus loin que tout ce qui a été fait dans l'atrocement malsain. Et si Fantasia a choisi "Une Nuit Sur le Mont Chauve" du Petit Moussosso à la place de ce truc horriblement glauque, c'est sûrement par censure Disney... ! Dès les premiers coups de piano et l'hurlement de l'orchestre, on est happé, paralysé et effrayé.
Il n'est pas étonnant que ce que Franz a réussi de mieux est une œuvre totalement dénuée de sentiments. Là, il se situe dans un terrain qu'il connaît bien, il n'a plus qu'à nous frapper d'image et nous impressionner par la virtuosité de ce piano froid et traînant et cet orchestre sans âme. Et comme s'il avait été frappé par la grâce divine, Liszt réuni en 15 minutes plus de mélodies intéressantes qu'il n'a réussi à en composer à travers l'ensemble de ses Rhapsodies Hongroises, alternant moments calmes et grandes orgies musicales ponctuées de ces entêtants glissandos.
A conseiller fortement, donc, quand bien même il s'agit de musique classique, et que de toute manière, tout le monde s'en bat les couilles de la musique classique. (Je n'espère même pas être lu)