C'est ma première tentative de critique pour une série, à titre informatif.
1983, c'est en quelques lignes une première série Netflix en Pologne, un titre suffisamment évocateur pour qu'on en devine le concept avant d'en lire la description, une enquête courte et longue à la fois, mais qui n'a en tout cas pas besoin de 8 co-intrigues pour nous maintenir en place, le tout se déroulant en 2003, 20 ans après des attentats, dans un univers uchronique. Je l'ai regardé en VO sur une 30aine d'heures, avec sous-titres.
Dans un premier temps, cette série est bien foutue et m'a parue réaliste physiquement, j'ai réussi à ne pas sortir de l'univers qui, même s'il est un peu barré, reste cohérent tout au long de la série. Un univers uchronique qui rappelle beaucoup The Man in the High Castle ou encore The Handmaid's Tale pour la composante 'alors oui c'est vrai qu'on pourrait voir ça comme ça' mais aussi qui relance suffisamment la composante historique pour que l'on soit prêts à accepter n'importe quoi. Là-dessus, je trouve 1983 meilleure que les deux séries précédemment citées. C'est un peu plus crédible de voir un Etat réussir à s'émanciper de l'autorité soviétique en 1980 qu'une société s'organiser en caste à différents niveaux de fertilité aux USA. Les influences et les trames narratives se mélangent beaucoup au niveau des époques: la NSA et le Vietnam ont tous les deux autant d'importance l'un que l'autre, il est question d'ingérence américaine et d'indépendance tchétchène. Vous aimez la géopolitique? À table!
J'ai bien aimé l'aspect de l'enquête, de la recherche, des confirmations. C'est un peu sombre au début mais on finit quand même par réussir à aligner les enjeux assez rapidement. Les différents groupes de protagonistes reviennent souvent avec plus ou moins d'implication mais jamais de too much, ou rien d'overcheaté. On n'est pas dans un film d'action avec des sorties de secours partout, si la police débarque, c'est fin du jeu. Et ça, mine de rien, c'est super chouette. Huit policiers avec une arme de poing, c'est un danger total, comme dans la vraie vie. Pareil pour l'aspect surveillance via la technologie. 1983 est tune excellent occasion pour nous rappeler qu'en terme de fantaisie, notre quotidien en 2018 est suffisant et qu'en général, une arme à feu, ça clôt plus ou moins n'importe quel débat possible. Pas de visée de Stormtrooper, ni de multi-roulade entre des blocs de bétons pour éviter des tirs d'arme automatique, le danger est ici présent à travers la simplicité.
Les points qui clochent à mon avis restent la créativité, l'ambiance pesante et le jeu de couleur.
Le sujet étant dark, le polonais étant un peu bourru à l'ouïe, le scénario étant basé sur des problèmes de bureaucratie, autorisations, influence de gouvernement, censure et autres mensonges... comment était-il possible d'en faire autrement? Spontanément, j'en sais rien là comme ça mais sur un sujet qui s'entrecoupe à 1/3 à tout péter, Sense8 me faisait beaucoup plus de bien! C'est comme quand tu vas voir un Gardien de la Galaxie 2, tu sais que t'y vas plus pour les blagues et la mixtape que pour le scénario, mais t'en ressors heureux d'avoir vu autant de couleurs que sur Elmer l'éléphant. Pareil pour un Pacific Rim, si on place ce 1983 dans la catégorie 'gros budget, gros marketing, on cible une niche'. 1983, c'est peut-être 200 nuances de teintes sombres bien utilisées, mais au mois de décembre, en Pologne, dans un script rempli de non-dits sur 8h, ça commence à faire beaucoup, beaucoup d'ombre. Vous êtes partis pour du béton, des bureaux désertés et des lieux publics désaffectés. Ça, c'est pour l'ambiance sonore et visuelle.
Est-ce problématique? Non. Sauf qu'avant, on a eu droit à Dark, The Handmaid's Tale, Taboo, Ozark, The Terror et j'en passe, qui ont plus ou moins tous eu droit au même traitement sur l'ambiance donc on ne révolutionne rien. L'ambiance mais aussi les sujets comme le tabou, le respect de la hiérarchie ou les passés douloureux ont été faits et refaits à de nombreuses occasions. Il n'y a aucun réel renouveau dans cette série, la narration est digne d'une vieille série allemande remodernisée: le méchant gouvernement, le gentil manipulé, les ennemis ne sont pas qui tu crois, et paf le coup d'un membre de ta famille que tu croyais disparu mais qui se sacrifie pour le héros, le mentor qui te lâche, etc. Je ne vois vraiment pas ce qui a été apporté concrètement, en quoi c'est un réel ajout au catalogue Netflix, compte tenu de ce qu'il propose actuellement.
Sauf que...sauf que ce dernier s'attaque à l'Europe de l'Est avec cette première série tournée en Pologne. En terme d'ambiance, de communication, d'émotion et de couleurs, ça doit être assez fidèle et bon, on vise à récupérer des abonnés là, où il n'y en a pas encore avant qu'Amazon ne débarque. Je ne pense pas que cela soit l'unique piste à exploiter dans cette région là du monde, mais pour une entrée en matière, c'est pas trop mal manœuvré. Sévère, mais juste...pas assez pour faire plaisir à tout le monde.