American Horror Story [saison 1] part d'un concept relativement original présenté comme un condensé de ce que le cinéma d'horreur a pu donner de meilleur, devenant ainsi à la fois une sorte d'hommage et de récupération des films les plus connus. Le principe est vu et revu (notamment dans Conjuring, récemment) : à savoir un manoir hanté dans lequel vient s'installer une famille américaine typique, dans l'optique de partir sur un nouveau départ, pourtant loin d'être aussi parfaite qu'elle s'efforcerait de le laisser croire. Les habitants vont cependant rapidement réaliser que tout ne tourne pas rond dans cette Maison du Mal où sont morts dans de mystérieuses conditions une multitude de personnes au cours du siècle dernier, dans laquelle compte chacun des anciens propriétaires.
De ce fait, les premiers épisodes servent d'introduction à cet univers dans lequel apparaîtront de nombreuses figures horrifiques. En effet, les quatre premiers épisodes posent les bases de la série en présentant une sous-intrigue différente à chaque fois, nous permettant d'entrevoir une part du passé de la maison et des drames qui s'y sont produits. Ainsi, on aurait tendance à se lasser rapidement d'effets de surprises usés jusqu'à la corde, dans des épisodes aux lignes conductrices assez redondantes avec des explications parfois un peu faciles. C'est sans compter sur une mise en scène presque clipesque, au montage foutraque et brouillon donnant à l'ensemble une sensation d'incohérence ou de trop soudaine rapidité dans l'enchaînement des actions, si bien qu'il arrive qu'on ne sache plus vraiment où l'on en est et que tout devienne très vite irréaliste.
Mais pas de craintes, la série reprend de niveau dans la deuxième moitié de sa première saison, avec une fulgurance dans l'avancée du scénario. Tout m'est devenue particulièrement intéressant à partir de l'épisode 7 dans lequel on sent enfin un approfondissement dans l'intrigue principale à laquelle viennent finalement se joindre les faits divers survenus jusque-là, nous éclairant sur des points alors jugés hors-rapport mais s'avérant plus être les pièces d'un puzzle complexe. Dans ce sens, il me semble qu'American Horror Story ne prenne de véritable sens qu'à ce moment-là avec une montée en puissance émotionnelle et dramatique. Il est clair que la série souffre d'un manque de rythme avec des inégalités entre le début et la fin qui, elle, fait preuve d'une progression et d'une soudaine envolée qu'on ne soupçonnait plus.
Mais une chose est sûre, c'est qu'American Horror Story aura su instaurer une ambiance qui lui est propre et certainement plutôt unique actuellement. Il y règne une atmosphère profondément malsaine, qui met mal-à-l'aise plus d'une fois et dérange par son approche crue de sujets pourtant assez tabous. La maison devient à personnage à part entière puisqu'elle est la source du mal. Elle semble prendre vie, se muer à travers les âges et toujours s'adapter aux nouveaux arrivants. De sorte à ce qu'elle ne soit plus seulement un lieu d'habitation mais bien une projection des névroses des personnages, qu'elle maniera à son gré de manière à les torturer de l'intérieure. Chacun des trois habitants devra faire face à ses propres démons (autant qu'à ceux qui hantent la maison) qui resurgiront de leurs méandres pour finalement les mener vers la folie.
La maison va les pervertir, les pousser à bout et leur faire commettre l'irréparable. Il ne semble pas y avoir un instant de répit tant la tension (sexuelle, meurtrière) qui y palpite devient un cauchemar psychologique où l'on enchaîne drame sur drame entre des murs plus que glauques qu'il arrive d'être couverts de sang. La maison devient une prison, un enfer duquel il est impossible de s'enfuir... et ce depuis des décennies.
Car il y a bien une chose que l'on ne regrettera pas dans American Horror Story, c'est la quantité de personnages qui y défilent. A commencer par les différents fantômes qui cohabitent dans la maison, et dont le nombre risque d'augmenter à chaque nouvel emménagement. On découvre peu à peu les histoires de ces fantômes, de ces âmes en peine errant de pièces en pièces à la recherche du temps perdu. Les scénaristes dispersent quelques informations, détails ici et là, furtivement entre les épisodes, pour au final nous offrir un tableau complet de leur situation d'alors. Habilement, ils arrivent à recréer des destins tragiques dont ils nous apprennent un peu plus à chaque fois, grâce à une élasticité intelligente de l'espace temporel permettant de revenir sur un même moment à travers des points de vue différents.
Parmi les protagonistes, on retiendra Constance, l'étrange voisine dont on se délecte de chaque apparition, Moira, femme à tout faire, jeune nymphomane aux yeux des hommes, vieille ménagère aux yeux des femmes, ou encore Tate, adolescent psychopathe à la gueule d'ange, pour ne citer qu'eux. Ces différents portraits permettent de dessiner celui d'une Amérique malade aux antipodes du rêve américain d'où ressort les travers, fantasmes et lubies d'une société où l'on préfère refouler ses désirs et qui vous mène à la frustration la plus totale. Et si l'on peut parler d'un final tout aussi déchirant qu'il est trop gentil et convenu, la scène de clôture reste machiavéliquement jubilatoire et laisse augurer du meilleur (donc du pire) à venir.