Cinq saisons déjà pour la plus horrifique des séries US, qui a maintenant plus ou moins fait le tour de la petite boutique des horreurs. Maison hantée, sorcellerie, maladie clinique, présence extraterrestre, monstruosité physique, autant de thèmes du film d'épouvante repris dans une anthologie aussi fascinante qu'exaspérante, où le primat esthétique a la fâcheuse tendance à effacer tout intérêt scénaristique. Ryan Murphy et Brad Falchuck reviennent ici avec une cinquième saison ultra-référencée, introduisant un nouveau bestiaire d'êtres perdus, marginaux, hors normes, pas si différents, finalement, des exclus du freak show précédent. Au bout des cinq premiers épisodes, on est intrigué (un peu), on s'ennuie (beaucoup), et on aimerait que l'intrigue décolle (enfin).
UNE LECON DE REFERENCES CINEMATOGRAPHIQUES
Si la série fascine, c'est aussi qu'elle entretient son image un peu intello de série esthétisante, loin des intrigues cadencées d'un How To Get Away With Murder où chaque séquence est l'occasion d'un nouveau rebondissement. American Horror Story, c'est une démonstration appliquée, une pédagogie du cinéma d'horreur, c'est un peu comme si un critique de cinéma se plaisait à énumérer ses références en les mettant en scène. L'hôtel Cortez de cette cinquième saison, c'est aussi l'Hostel des tortures d'Eli Roth, l'hôtel Dolphin de la nouvelle de Stephen King, adaptée en 2007 au cinéma (La Chambre 1408). Mais surtout, surtout, les longs couloirs quadrillés du Cortez, ses tapisseries kitsch, ses apparitions furtives d'enfants silencieux et effrayants, ses habitants morts depuis un certain temps, font de cette nouvelle saison un hommage (peut-être trop) évident au chef-d'oeuvre de Stanley Kubrick, Shining. Difficile de se détacher d'une telle référence, quand l'intrigue se déroule là aussi presque intégralement en huis clos, dans cet hôtel californien où cohabitent vivants et morts.
LADY GAGA, REINE DES VAMPIRES
L'absence de Jessica Lange au casting de cette saison avait fait couler beaucoup d'encre : les créateurs allaient-ils réussir à renouveler une franchise sans sa figure de proue ? La manipulatrice Elsa Mars du Freak Show a donc été remplacée par la sulfureuse Countess, interprétée par une Lady Gaga bluffante. C'est elle qui, dans ce microcosme anxiogène, édicte les règles : figure politique mais aussi sensuelle, la comtesse effraie autant qu'elle attire. Un truc de vampires, sans doute, façon True Blood. Et c'est la le coup de poker des deux créateurs : alors que la vague Twilight est aujourd'hui passée, que le soap adolescent The Vampire Diaries touche à sa fin, que True Blood s'est enfin terminé après deux saisons de trop, American Horror Story s'intéresse aux mythiques vampires. Malheureusement, la série ne fait que reprendre des traits narratifs vus et revus et ne propose qu'une relecture partielle de ces figures autrefois fascinantes. Plus que Lady Gaga et ses multiples conquêtes, ce sont ces jeunes enfants aux figures trop blanchâtres pour être humaines qui attirent l'attention : ces petits vampires sont presque plus effrayants que leur « mère », ne laissant paraître aucune émotion. Car c'est là bien la seule innovation véritable d'AHS Hotel : la présence d'enfants au coeur de l'intrigue, alors que l'anthologie n'avait pas encore vraiment évoqué le sujet : parqués dans une salle de jeu anxiogène, version cauchemardesque des décors de l'enfantin Charlie et la Chocolaterie, ces apprentis vampires aux cheveux blancs sont à la fois attachants et inquiétants, à l'image du fils de l'inspecteur John Lowe (Wes Bentley) et de sa femme Alex (Chloë Sevigny), enlevé par la Countess alors qu'il était tout jeune.
LA FORME D'ABORD, LE FOND ENSUITE
Comme dans les éditions précédentes de l'anthologie, Murphy et Falchuck aiment à décrire des personnages hors normes, joués par des acteurs toujours très bons. En premier lieu desquels la géniale Sarah Paulson , qui interprète une prostituée-droguée-décédée, condamnée à une tristesse éternelle entre les murs de l'hôtel Cortez. On retrouve d'autres visages du freak show : Kathy Bates, Evan Peters ou encore Denis O'Dare font à nouveau partie du bestiaire horrifique d'AHS. Malgré des personnages toujours extrêmement bien dessinés, un cadre propice à une intrigue tenue, la série préfère là encore proposer une mise en scène soignée sans véritablement faire le choix d'un scénario cohérent. Du même coup, difficile de maintenir un intérêt pourtant nettement éveillé lors du pilote : l'on regarde plus par attachement pour la franchise que pour un réel engouement.
American Horror Story reste le show le plus populaire sur FX, qui avait réuni lors de la diffusion du pilote près de 7 millions de spectateurs. La chaîne vient d'ailleurs de commander une sixième saison au showrunner Ryan Murphy, qui travaille déjà sur deux autres séries, la déjantée Scream Queens et la nouvelle anthologie American Crime Story.
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