Aspergirl par Christine Deschamps

Les bonnes intentions ne suffisent certes pas à faire une bonne série, m'enfin, c'est au moins un début. D'autant que l'interprétation, globalement, est plutôt à la hauteur, et l'écriture des personnages plutôt honorable, avec une mention particulière pour la copine du supermarché et la sœur, modèles féminins hors des clous habituels, qui parviennent à exister en face d'un personnage principal quasiment de tous les plans. Atypique lui aussi, puisque autiste, comme son rejeton qui ne mange que des aliments blancs. Il s'agit d'une petite fable sur la différence, bien entendu, sympathique et sans grandes ambitions, mais qui joue sa petite musique avec détermination. Tout le monde est gentiment décalé dans cette histoire de garde d'enfant qui évite les écueils habituels car les principaux impactés échappent aux grandes marées émotionnelles grâce à ce trouble providentiel. En fait, on les envierait presque : l'imbécillité ambiante les laisse de marbre, leurs pensées sont ailleurs, et même l'agressivité fond sur eux comme du beurre sur une poêle, simplement parce qu'ils n'ont pas les capteurs habituels. C'est tout l'intérêt de cette histoire : mettre en scène l'autisme, qui n'est pas une maladie, dans des situations banales (l'école, le boulot, la justice...) et montrer en quoi notre monde standardisé ne peut pas prétendre s'appliquer et convenir à tous. On s'est tous sentis neuroatypiques ces dernières années, en regardant les infos, causant avec sa hiérarchie, lisant une notice administrative ou décrochant le téléphone pour se faire refiler de force des bidules à 1 euro. Tout détonne, étonne et déconne, en fait, quand on y réfléchit bien, et cette petite série vite regardée et probablement vite oubliée laisse quand même l'impression qu'on a le droit de ne pas rentrer dans les cases étroites qu'on nous réserve sans pour autant mériter la camisole. C'est déjà ça.