Voilà qu'arrive enfin l'ouverture de la rubrique « séries », et pour cette occasion je me devais d'en choisir une à la hauteur.
A une époque où les séries sont légions, étant lancées aussi vite qu'elles sont arrêtées (Terminator, Le diable et moi, Le retour de K2000, etc), il est devenu difficile de faire confiance aux producteurs et de suivre une série en toute quiétude, se demandant à chaque fin de saison s'il y aura une suite.
D'ailleurs la plupart du temps, pour être sûr de la pérennité d'une série, il faut faire confiance au mainstream, comme 90210, plutôt qu'à l'indépendant comme Le diable et moi. Heureusement, Breaking Bad, malgré son appartenance à la seconde classe, survit tranquillement sur la chaîne américaine AMC (également produit par celle-ci) et il aura fallu attendre deux ans avant qu'une chaîne française se décide à l'importer. Canal+ s'était d'abord mis sur l'affaire, puis jugeant la série trop politiquement incorrect, laissa tomber l'affaire, qui fût reprise par Arte qui a annoncé le début de sa diffusion pour septembre 2010.
Breaking Bad, sous ses airs de thriller sur le trafic de drogue, est surtout, et avant-tout, un essai sur la croisée de chemins, la rencontre du bien et du mal, la damnation et la rédemption.
Walter White (Bryan Cranston) est un professeur de physique quinquagénaire, vivant une vie plate et ennuyeuse, rabaissé, mal payé et obligé de laver les voitures pour subvenir aux besoins de sa famille, sa femme Skyler (Anna Gunn) et son fils Walter Junior (RJ Mitte). La révélation lui apparaîtra, non pas sous la forme d'un buisson ardent, mais sous celle d'un cancer et fera prendre un tournant à sa vie, sans marche-arrière possible. Voulant laisser à sa famille de quoi vivre après sa mort, il décidera de se lancer dans la fabrication de Meth (équivalant du crack), aidé par un de ses anciens élève, Jesse (Aaron Paul), devenu petit trafiquant, et ayant les compétences requises pour l'accompagner dans cette dangereuse aventure. Vendant d'abord au détail, Walt se rendra vite compte que s'il veut atteindre son but il lui faudra passer à la vitesse supérieure et traiter avec les cartels Mexicains.
Pour une bonne compréhension, il faut savoir que Breaking Bad, au-delà d'une série sur la drogue, est une série sur un fléau que connaît les Etats-Unis, à savoir la Meth, drogue ayant des effets euphoriques et relaxants comme le cannabis, mais en beaucoup plus puissant et beaucoup plus nocif. Il suffit de faire une recherche sur Youtube pour voir à quoi ressemble un addict de cette drogue, sorte de zombie édenté et paranoïaque, sujet à des hallucinations et crises de terreur. Sa fabrication est d'ailleurs assez simple, se basant principalement sur des antalgiques à base de pseudoéphédrine, c'est d'ailleurs pour cette raison qu'aux States on ne peut en avoir que sur ordonnance, à l'inverse de la France où ils sont en vente libre. Albuquerque, capitale du Nouveau Mexique, est d'ailleurs un lieu prisé par les trafiquants, ces derniers n'ayant qu'à traverser la frontière pour s'en procurer au Mexique. Avec une telle simplicité il est logique que beaucoup s'y essayent, mais sa fabrication nécessitant de l'acide il est fréquent que des accidents arrivent, brûlant les chimistes, leurs maisons et parfois même leurs enfants. On pourra comprendre que devant cet état de fait Canal+ ait décidé de ne pas diffuser cette série, ne voulant probablement pas lancer de nouvelles vocations, quelques boites d'Humex et ingrédients basiques de chimie étant suffisant pour commencer.
Cependant Breaking Bad ne fait pas l'apologie de cette drogue, mais montre par une scénarisation excellente, riche en rebondissements, comment ce trafic peut vous faire connaître l'enfer avant la mort. La série joue d'ailleurs sur deux tableaux, nous montrant le destin de Walt, s'enfonçant dans un tourbillon infernal, et celui de Jesse, qui au contraire fera tout pour s'en sortir.
Vince Gilligan, réalisateur et scénariste, signe ici une série passionnante, à l'écriture particulièrement riche, et qui on l'espère aura la longue vie qu'elle mérite. La troisième saison s'est d'ailleurs achevée il y a quelques mois, et AMC en a commandé une quatrième à Gilligan.
A noter que Bryan Cranston, connut aussi pour son interprétation du père de Malcolm, a reçu, pour Breaking Bad, le prix de la meilleure interprétation aux Emmy Awards, et ce durant trois années consécutives. Aaron Paul, a reçu quand à lui le prix du meilleur second rôle cette année.