Saison 1 - "Chemestry is the Study of Change "
N'arrivant pas à faire le deuil de ma série préférée que j'ai semble t-il un peu trop vite consommé, j'ai décidé de revenir à mon tour sur Breaking Bad en effectuant une critique de chaque saison une part par une. Cela peut vous sembler beaucoup mais pour moi cela me semble même trop court. Car l'oeuvre de AMC est une histoire si riche, si profonde, si complexe et si dense qu'il est impossible d'en parler sans faire du cas par cas.
Je vais évidemment spoiler l'intégralité de la série alors si vous ne l'avez pas encore commencé ou si vous n'avez pas encore terminé la saison que j'aborde, nos chemins vont devoir se séparer.
En avant pour la saison 1. L'histoire est celle de Walter White, un professeur de chimie sur-qualifié qui chope le cancer des poumon alors que le gars n'a jamais fumé de sa vie. N'ayant pas le plaisir de vivre en France, où tous les ennuis de santé peuvent se soigner à l'aide d'une carte vitale, le pauvre bougre n'a malheureusement pas les moyens de prendre en charge ses frais médicaux. Se sachant condamné il décide de gagner rapidement de l'argent pour assurer la sécurité financière de sa famille après sa mort. Mais au lieu de braquer une banque ou de kidnapper des gosses, le petit coquin a une idée encore plus folle, se servir de ses connaissances en chimie pour créer la drogue la plus pure jamais vue dans le Nouveau Mexique et la dealer à travers tout l'état le plus rapidement possible. Il va alors s'associer avec son ancien élève Jesse Pinkman, une sorte de Cortex junior, kaira de la zup digne des Inconnus. Rien ne se passera cependant comme prévu et nos deux héros seront confrontés à toute une série d’épreuves qui les feront progressivement sombrer vers les ténèbres et le chaos du côté obscur.
Avec un pitch en béton comme celui-ci, l’échec est quasiment impossible. Et en effet, la série est une immense réussite et ce dès la première saison. Mais pour moi elle s'élève d'emblée au dessus de toutes les autres, car c'est celle qui a su le mieux exploiter son support artistique. Le scénario consiste en grande partie à suivre l'évolution des personnages principaux au fil des saisons, chose assez peu répandu jusqu'à alors. Je n'ai pas une immense culture sériphilique, mais j'ai quand même l'impression que jusqu'à la fin des années 2000 les chaînes ne nous proposaient qu'une flopée d'épisodes fonctionnant tous sous le même Mode opératoire, ainsi que des intrigues étirées sur 12 heures. Les personnages restaient les mêmes du début à la fin et ne connaissaient aucune évolution réellement notable. La seule à avoir tenté l'expérience c'est Dexter et on ne peut pas dire que ce soit une réussite. Et c'est bien dommage car une série est le meilleur moyen pour raconter une évolution. Vince Gillian, le créateur de Breaking Bad l'a parfaitement compris et a exploité le support à son maximal. Il a fait de son oeuvre non pas un récit sans fin et sans but qui se prolongera indéfiniment mais bel et bien une histoire qui va quelque part, avec un début, un milieu et une fin.
En général les séries aussi profondes et intelligentes se font surtout bouder auprès du grand public. En effet, Les Sopranos, The Wire ou Mad Men malgré le culte qu'on leur vaut n'ont jamais fait l'unanimité. Breaking Bad lui, est arrivé à convaincre à la fois la critique et le public, une performance rare qui n'a rien d'étonnant.
Car ce qui la différencie de ses concurrentes c'est son accessibilité et son univers beaucoup plus fun et divertissant. Comme vous avez pu le remarquer, le concept de base complètement barré permet de jouer à la fois dans le registre comique et dramatique. Cette spécificité sera parfaitement réussit ici, puisque l'émotion pure ou le pathétique côtoie de près l'humour noir et sarcastique, le tout se mélangeant très bien dans l'univers à la fois réaliste et décalé de la série. A une scène purement burlesque comme lorsque Jesse essaye de transporter un corps au moment où Skyler va lui rendre visite, se succède sans problème le meurtre poignant de Crazy 8 par Walter. Parfois même ces deux tonalités cohabitent dans la même scène comme lorsque Walt essaye de s'enfuir en slip dans son camping-car intoxiqué et remplie de cadavres.
De plus elle mélange astucieusement les genres puisqu'on peut à la fois l'a considéré comme un récit mafieux noir et épique, une série d'action remplie de rebondissements et de suspens, et bien évidemment une histoire s'intéressant à des personnages forts et en perpétuel développement. L'oeuvre de Gillian est si diversifiée qu'au final tout le monde peut y trouver son compte, au point qu'il est quasiment impossible d'y rester insensible.
Mais au delà de ça, Breaking Bad est avant tout une histoire profonde exploitant toute une série de thèmes et de de réflexions tous plus intéressants les uns que les autres. A travers le destin de Wlat, les scénaristes tentent de nous faire réfléchir sur la nature humaine, sur la part d'ombre qui sommeille en chacun de nous et qui, si les événements le permettent peut faire de nous des êtres radicalement différents. Cette thèse sera développée durant tout le récit et d'une manière extrêmement subtile et intéressante.
Loin de prendre son public pour des cons, le créateur va distiller son analyse de façon à ce que chacun se fasse sa propre opinion sur le message véhiculé par l'histoire. C'est fin mais jamais ennuyeux et toujours raconté de manière passionnante et très divertissante.
Il m'est impossible de parler de cette série sans évoquer les nombreuses personnalités qui la composent et sans qui elle ne serait rien.
Nous avons donc à sa tête, le célèbre Walter White, véritable caricature du bon père de famille coincé du cul, faible, timide, apeuré par la vie, impuissant, sans aucun charisme, aucune autorité.... bref une bonne grosse lavette qui ne nous laisse pas insensible et pour qui on ne peut s'empêcher d'éprouver de l'affection et de la pitié. Walter a beau avoir une belle famille qui l'aime, avec une femme dévouée qui fait tout pour son bonheur, le pauvre n'est pas heureux. Déjà parce que son maigre salaire de prof ne lui permet pas de subvenir correctement aux besoins de sa famille et qu'il se voit contraint d’exercer un autre métier pénible et indigne de ses qualifications. Ce cancer qui survient brutalement dans sa vie et vient lui indiquer que ses jours sont comptés est l'élément déclencheur qui le fera basculer à jamais. Il réalise enfin qu'arrivé à la fin de son existence il est passé à côté de sa vie, qu'il n'est pas devenu l'homme qu'il souhaitait devenir et qu'il crèvera comme la victime de service qu'il est, pitoyablement dans un hôpital, laissant derrière lui le souvenir d'une lavette encore plus diminuée, que l'on prend plus en pitié qu'en sympathie. Alors histoire de partir la tête haute et de se prouver à lui même qu'il n'est pas n'importe qui, il décide d'assurer seul la sécurité financière de sa famille en se lançant à corps perdu dans la fabrication de méthamphétamine pour le peu de temps qui lui reste à vivre. On pourrait penser que les intentions de Walt au début de la série sont tout à fait honorables et que le personnage ne peut être pour l'instant considéré comme un anti-héros, car c'est encore un être profondément bon, courageux et dévoué, mais en vérité il n'en ai rien. Car comme je l'ai déjà expliquer c'est avant tout pour se prouver à lui-même qu'il est capable de faire quelque chose d'important au moins une fois dans sa vie. Le bonheur de sa famille reste l'objectif à atteindre bien sur, mais ce n'est pas sa priorité, sa priorité c'est QU'IL assure la sécurité de sa famille et personne d'autre. Preuve en est dès le 3° épisode, où ses ex-associés Elliot & Gretchen se proposent de couvrir tous ses frais médicaux ainsi que de fournir tout l'argent nécessaire à ses proches après sa mort. Si Walt se souciait réellement du bonheur de sa femme et de ses enfants avant toute chose il aurait mis son ego de côté et aurait accepté l'offre de ses amis. Au lieu de ça, il refuse et préfère continuer à mettre sa vie en danger dans un trafic incertain tous ça pour prouver que c'est lui qui a la plus grosse. Non croyez moi, les apparences sont parfois trompeuses, Walter était déjà un être égocentrique et égoïste dès le départ et son nouveau business ne va pas le changer mais contribuer à relever en faite quel homme se cache derrière cette pauvre victime. Car si le chimiste n'est pas encore devenu l'ignoble génie machiavélique et sans pitié que l'on découvrira dans les prochaines saisons c'est parce que jusqu'à présent il n'avait jamais eu à affronter des épreuves aussi dures qui l'aurait fait surmonter ses peurs et ses doutes. Si il met tant de temps à se débarrasser de Crazy 8 c'est plus par lâcheté que par réelle compassion. Et plus il s'enfonce progressivement dans le crime, plus il prend confiance en lui et plus s'autorise à faire des choses qu'il n'aurait jamais été capables d'accomplir auparavant. N'est pas lui qui tabasse avec violence un lycéen dans un magasin de fringue ? N'est ce pas lui qui fout le feu à une bagnole dans la station service ? N'est ce pas lui encore qui ose menacer un puissant dealer armé de fulminate de mercure ? Tous ces éléments montrent bien que le Heinsenberg est déjà parmi nous, il est juste limité par ses propres peurs et son humanité, mais les prochains événements se chargeront ensuite de poursuivre sa métamorphose.
Le choix de Bryan Crabston dans un tel rôle avait de quoi surprendre vu le CV du comédien, mais son incroyable performance a tout de suite mis tout le monde d'accord. L'acteur incarne en effet avec beaucoup d'intensité et de sincérité son personnage. Je reste à chaque fois sans voix devant tant de talent, rien que par un seul regard on sent toute la détresse et l'impuissance de cette homme, perdu dans une histoire qui le dépasse. Il faut dire que le look arboré par le perso sublime son jeu d'une manière exceptionnelle. Les réals auront d'ailleurs la briante idée de faire évolué son look en même temps que le personnage change de mentalité pour que sa transformation soit parfaitement réussit. Cranston connaît son rôle de A à Z, sait parfaitement retranscrire toutes ses émotions et sera également adapté son jeu au fil des saisons.
Maintenant parlons un peu du personnage de Jesse. Je vous jure que la première fois que je l'ai vu je me suis dis: "pourvu que ce gamin crève vite !". Je suis sérieux, avec ses allures de kaira de bac à sable, ses "yo" toutes les 3 secondes et sa personnalité foncièrement détestable, je ne souhaitais qu'une chose, voir ce perso dégagé de la série le plus rapidement possible. En plus à première vu ça semble être le mec qui fait ça juste pour le fric et la cam, aucune profondeur, rien. Au contraire de Walt qui lui a des motivations bien plus respectables. Pourtant, ce rejet ne dura pas. Car dès le 2° épisode, Jesse nous apparaît comme étant un être ultra charismatique, débordant de personnalité et qui peut se montrer (à ses dépends) monstrueusement drôle. Mais c'est surtout quand les scénaristes commencent à s'attarder en détail sur la psychologie du personnage qu'il en devient réellement attachant. En effet, grâce à un épisode qui lui presque entièrement dédié, on comprend en faite que Jesse n'est pas intéressé par le trafic de meth. Il ne prend aucun plaisir à le faire, ça ne l’intéresse pas d'avoir du pouvoir et de l'argent et il troquerait volontiers son labo clandestin contre un job honnête, dans la musique de préférence. Seulement le gars est pris au piège, ayant quitté l'école très jeune il ne bénéficie d'aucune qualification pour exercer un métier important. Il ne peut pas non plus compter sur le soutien de sa famille, car ses parents n'ont plus confiance en lui et le rejette à la moindre occasion de leur domicile. Et puis il aime bien consommé de la meth, et la fabriquer lui permet aussi de satisfaire ses besoins de junkie. C'est donc par nécessité que le bonhomme continue de dealer et non par plaisir, ce qui en fait un être auquel on se prend d’empathie et d'affection au même titre que Walter.
Aaron Paul est lui aussi extraordinaire dans le rôle titre. Le comédien incarne parfaitement cette petite frappe arrogant, excité et immature. Son jeu chargé en mimiques et gimmicks vocales de toute sorte donne beaucoup de personnalité et de charisme au personnage. C'est certes un peu cliché, mais sans jamais tomber dans la caricature facile et surtout sans que cela ne desserve le personnage.
Jesse a beau être déjà mouillé dans le business, il ne représente rien dans le milieu. C'est juste un petit trafiquant qui n'a pas les épaules ni le désir de rivaliser avec les plus grands. Il est donc tout aussi novice que Wlater dans ce domaine et c'est tout l'intérêt de cette première saison. Voir ces deux pieds nickelés jouer aux apprentis sorciers dans un univers auquel ils ne sont pas préparés offre d'innombrables scènes à la fois poignantes, drôles et passionnantes.
Cette saison étant plus courte que les suivantes, les personnages secondaires sont un peu mis de côté. Je ne vais donc pas m'attarder sur chacun d'entre eux. Retenez juste que :
-Skyler = Femme dévouée qui aime son mari
-Hank = Beau gosse sympas et sur de lui
-Walter Jr = ado naïf qui ne voit que le bon côté de la métamorphose subit par Walt
-Mary = personnage chiant et inutile dont les scénaristes ne savent visiblement que foutre
Mais bon, malgré ceci j'adore cette première plongé au cœur de Breaking Bad. Je la trouve même supérieur aux saisons 2 et 3 par exemple. Parce que celle-ci ne laisse aucun temps mort. Chaque épisode contient son lot de scènes cultes et prenantes. On ne s'ennuis jamais, on est happé par le récit qui se dessine petit à petit, comme hypnotisé par ce que nous voyons. Dès lors une fois commencé c'est dur de s'arrêter. On engloutis les 7 premiers épisodes en peu de temps et on passe illico à la suivante. J'ai rarement été aussi captivé par une série et ce de façon aussi immédiate et rien pour ça je dis chapeau !
D'un point de vue technique c'est là aussi un sans faute. La réalisation est fabuleuse, chaque plan est réfléchit au millimètre près et procure l'émotion qu'il doit procurer au spectateur. Si elle peut se montrer souvent tape à l'oeil ce n'est jamais au détriment de l'histoire ou des situations. Au contraire, l’esthétisme visuel très poussé de l'oeuvre confère au scénario une ambiance unique et incomparable. Outre le fait de renforcer l'intensité de certaines scènes pour donner des moments extrêmement intenses, autant dans le fond que sur la forme.
Je conclurais ce premier retour en m'exprimant sur le sujet qui fâche à savoir, la version française de Breaking Bad. VF que bon nombre d'entre vous critiquent avec violence alors qu'ils ne l'ont écoutée que lors de comparaisons débiles sur youtube. Pour ma part je la trouve très bonne. Elle n'est cependant pas parfaite car pas mal de répliques sonnent beaucoup mieux en VO qu'en VF, je l'admet. Cependant la performance des comédiens choisis est irréprochable. Chaque voix colle parfaitement à son personnage et joue son rôle à la perfection. J'aime particulièrement les voix de Gus et de Mike qui sont pour moi bien supérieur à la version américaine. Et je maintiens qu'l n'est pas nécessaire de la regarder en anglais pour pouvoir pleinement l'apprécier. J'estime avoir la liberté de choisir dans quelle langue je veux mater mes séries et si la version française ne trahit pas l'oeuvre d'origine, alors pourquoi s'en priver ? Y'a tellement d'autres VF horribles dans l'univers des séries, pourquoi cracher sur celle-ci en particulier ?
Je conclus donc ma critique ainsi. Celle-ci fut un peu longue mais il y avait beaucoup de choses à évoquer, les prochaines seront plus courtes je vous le promet. J'en sortirais une toutes les semaines que je mettrais d'abord sur les fiches OST de la série, puis sur d'autres œuvres qui ne seront de toute façon jamais critiquées. Si vous souhaiter les lire je vous conseille de suivre la conversation en bas de ce texte, comme ça je vous mettrais directement le lien pour la suite ici.
Sur ce à la semaine prochaine et surtout n'oubliez pas https://www.youtube.com/watch?v=-d23GS56HjQ