C'est parti pour ma critique. Je viens juste de visionner dans un temps court la série. Content d'avoir terminé.
ATTENTION ⚠️ : La critique peut contenir du SPOiL. La critique concerne toute la série.
Comme je viens de le dire je suis content d'avoir terminé. Par honnêteté je dois dire que je suis de manière général assez réticent au genre de la série. Je n'aime par leur lenteurs, leur inefficacité, la façon qu'elles ont de nous rendre captifs.
Et je dois dire que sur ces points Breaking Bad ne déroge pas à la règle. L'effet de surprise du début de serie laissera inexorablement place à un amolissement, à une manière de tourner en rond. La série nous frustre comme elle se doit. La situation initiale : gagner de l'argent rapidement par la drogue pour faire face au cancer va de fait perdurer très longtemps. L'argent rentre puis l'argent ressort de manière presque aussi automatique. La tension de la série repose pendant très longtemps et presque jusqu'à la fin sur lcette logique.
Car BB c'est un scénario sommes toutes très mince qui tiendrait sur quelques pages écrites. Et ce scénario il faut le faire durer sur plus de 60 épisodes, c'est à dire sur plus de 40 heures de visionnage.
De ce constat découle plusieurs defauts inévitables : la réalisation use et abuse de la lenteur des scènes. Si la lenteur est un luxe parfois fabuleux sur un film de 2h, elle est le parent pauvre d'une série de 40h. Donc sous prétexte d'installer une ambiance, les scènes durent une plombe.
Cela conduit à la critique suivante : une surexploitation des visages, des attristements. Préparez-vous à observer Walter White se questionner douloureusement une centaine de fois. Sa femme le soupçonner tout autant. La palme revient à Pinkman a qui on demande d'avoir un visage dévasté de désespoir une saison entière (la dernière). Et même avant cela il fallait s'habituer à le voir rougir ses yeux et bouillir intérieurement de manière récurrente.
Conséquence suivante de la faiblesse du scénario : le série déporte l'intrigue pour une grande part sur l'antagonisme des personnages. En fait c'est bien simple sans un antagonisme parfois exaspérant, la série n'aurait plus aucun carburant. Car non seulement l'antagonisme est souvent l'objet principal donné à voir. Mais en plus le scénario n'arrive à évoluer que du fait de ces antagonismes. Les scénaristes usent et abusent de cela pour faire avancer la machine en créant des situations inextricables.
J'arrive à ma dernière critique, la plus problématique pour moi. La série est absolument cyclique. Je veux dire par là qu'elle répète en permanence les mêmes situations. Et notamment donc les mêmes antagonismes. La relation entre White et sa femme sera un interminable balancement entre un "je te comprends", "je te comprends plus". Ils se disputent, se réconcilient, se redisputent,... la relations n'évoluent au fond pas vraiment. Ce sont toujours les mêmes reproches de sa femme auquels il répond toujours plus ou moins de la même manière. Il veut protéger sa famille, le faire seul, sans lui en parler. Elle veut comprendre mais il est distant. Une fois qu'elle sera devenue sa complice, le triptyque sera le même. Elle veut être en sécurité et lui en veut. Lui reste inflexible et veut tout garder sur lui. ils n'arrivent pas a discuter. Quand on pense que leur relation s'améliore, elle se redégradera très vite. La chose se répétera plusieurs fois. Jusqu'à l'inévitable rupture mais qui au fond fonctionne toujours pareil puisque elle lui donnera une ultime rencontre de "conciliation".
L'antagonisme avec Pinkman. Celui-ci est encore plus caricatural. Pour faire simple White veut le protéger mais est méprisant. Pinkman est fier et donc le rejette. Un coup ils sont complices, un coup Pinkman pète un plomb. C'est de loin le personnage le plus caricatural de la série. C'est presque inévitable puisque TOUTE la série repose sur son caractère erratique. Sans Pinkman White devenait riche de la drogue, fin de l'histoire. Avec Pinkman des explosions invraisemblables reviendront toujours aux moments où tout va bien. Là où la relation entre White et sa femme évolue tout de même, donnant un intérêt, celle d'avec Pinkman est vouée à stagner. Car Pinkman est un personnage à la fois terriblement stupide et subitement terriblement malin, touché par les grâces de raisonnements subtiles. Il incarne l'incapacité à se résoudre au mal, là où White incarne cet être égotique qui a choisi la voie de l'individualisme, non pas peu importe le mal, mais en l'acceptant comme inéluctable. Donc Pinkman va sombrer petit à petit, retourner à la drogue utilisée comme dérivatif à ses souffrances morales. Il se cherche, oscille entre acceptation du mal, et détestation de soi. Ça a son intérêt certes mais cela dure 40 heures. Sa situation émotionnelle n'évolue pas vraiment. La série nous condamne à l'observer sans perspectives. C'est certes raccord avec un certain réalisme, mais à observer c'est juste usant.
Car, comme je l'ai dit c'est Pinkman qui crée quasiment tous les rebondissements de la série. Et pour se faire elle use de facilités qui franchement sont grossières. Je ne vais pas les détailler mais très souvent la ficelle est trop grosse. On regarde et on se sent pigeonné. On voit venir les trucs. Ou du moins on peut les juger fort de café.
Mais bien sûr la série a plein de qualités. L'idée originale est au début excellente, la première saison (sa première partie du moins) est jouissive. Les personnages, pour la plupart, évitent la caricature et leur évolution est faite tout en douceur (série oblige) donnant un réalisme certain. Le cœur du réacteur étant de voir comment ce professeur de chimie va devenir un caïd de la drogue. Et c'est très bien fait. Car Walter White va certes se durcir inéluctablement, mais sans jamais qu'il devienne caricatural. On assiste à certains de ses comportements violents, inexplicables. Puis a ses remords. On observe un homme changer avec subtilité. Et quand cet homme sera devenu capable de faire tuer et de tuer, encore une fois ca sera en dehors des caricatures. Walter White sera crédible tout du long. C'est évidemment le clef de voûte de la réussite de la série.
Les temps morts au sein des saisons sont bien gérés, pas trop longs, et les réalisateurs savent remettre du rythme dans des situations qui sont tout de même assez originales. Bon et j'en passe, il y a tellement d'avis positifs déjà écrits.
La fin de la série a quand même un goût un peu amer : encore une fois une situation devenue "parfaite" : beaucoup d'argent, tout est protégé, est bousculée par un petit livre avec dédicace que White laisse dans les toilettes... oui ce même monsieur capable de calculer 20 coups en avance, qui a vu le livre du chimiste dans les pièces à conviction, laisse une dédicace similaire dans ses toilettes, à la vue potentielle de son beau-frère. La dégringolade qui s'en suit est jouissif, cette confrontation tant attendue entre les deux beaux-frères sous le sceau de la vérité fait plaisir à oobserver. Il ne demeure pas moins que le déclencheur est un peu ridicule.
Pareil pour la chute finale. Pinkman n'arrive plus à raisonner normalement et se met, une nouvelle fois, à haïr celui qui l'a toujours protégé, certes par la manipulation. Et cela jusqu'à le balancer aux flics, du moins à son beau-frère, celui-là même qui l"avait passé à tabac. Et tout est foutu, tout dérape de manière inenvisageable. Pas vraiment de morale, la série se termine par une descente aux enfers. Finalement White comprend une chose, le cœur de toute cette affaire c'était lui, se sentir vivant en dehors des clous. Faire de la chimie, réussir dans un domaine. Et si protéger sa famille n'avait été que le prétexte ?
Rideau