Dix ans après la fin de Bref., Kyan Khojandi revient avec Bref.2, une suite aussi inattendue qu’audacieuse. Ce retour, marqué par un passage au format 30 minutes, change radicalement l’ADN de la série tout en conservant l’essence qui en a fait son succès. Ce Bref. nouvelle génération ose prendre son temps, quitte à perdre une partie du rythme frénétique de la première saison, mais compense largement par une écriture plus aiguisée et une profondeur émotionnelle inédite.
Le changement de rythme est probablement l’élément qui marquera le plus les spectateurs dès les premières minutes. Finie la narration en rafale, les jump cuts incessants et la cadence effrénée qui caractérisaient la première saison. Ici, l’histoire respire davantage, chaque scène s’autorise à s’étirer, à laisser place au silence et à la contemplation. Cela pourrait être un frein pour certains, nostalgiques du tourbillon narratif d’antan, mais ce choix sert une ambition bien plus grande : offrir au personnage principal une véritable évolution psychologique, une introspection plus tangible qui pousse le spectateur à s’identifier encore plus profondément à lui. Là où la première saison captait avec humour l’absurdité et la frustration du quotidien, cette suite va plus loin, en confrontant Kyan à une prise de conscience vertigineuse : il est "celui du film". Cette révélation change radicalement sa perception du monde et l’entraîne dans une réflexion existentielle aussi captivante que déstabilisante.
Ce basculement narratif fonctionne d’autant mieux grâce à un jeu d’acteur en parfaite adéquation avec les nouvelles ambitions du projet. Kyan Khojandi, toujours aussi juste, incarne un personnage plus en retenue, dont l’évolution se lit davantage dans les regards et les silences que dans le débit ultra-rapide de ses monologues. Il est épaulé par Laura Felpin, qui insuffle à la série une énergie nouvelle et un naturel désarmant. Son personnage, Billie, apporte une touche d’imprévisibilité et d’émotion qui équilibre parfaitement les errances du héros. Son jeu oscille avec finesse entre comédie et sincérité brute, faisant d’elle une pièce maîtresse du casting. Keyvan Khojandi, quant à lui, trouve une place plus marquée dans cette suite, permettant d’approfondir la dynamique familiale et d’ajouter des moments de complicité qui sonnent toujours juste.
L’humour, malgré une approche plus posée, reste un pilier fondamental de la série. Il est moins basé sur l’accumulation frénétique de situations absurdes et davantage ancré dans le malaise et la lucidité cruelle du quotidien. Les dialogues sont d’une précision chirurgicale, et certaines scènes atteignent un niveau d’identification rarement vu dans une série française. Plus que jamais, Bref.2 nous parle, nous renvoie à nos propres doutes et à nos contradictions.
Si cette saison divise par son changement de rythme, il serait injuste de ne la juger qu’à travers ce prisme. Ce que Bref.2 perd en dynamisme, il le gagne en profondeur et en sincérité. C’est un projet qui refuse de répéter mécaniquement une recette déjà éprouvée et qui préfère évoluer avec son public, au risque de dérouter. Et c’est précisément cette audace qui en fait une réussite.