Mini série efficace et bien mise en scène*, qui a le mérite de relancer l’intérêt sur la catastrophe nucléaire de Tchernobyl en 1986, mais qui hélas prend trop de liberté avec la réalité pour être satisfaisante et ce d’autant plus que les auteurs insistent au début et à la fin sur les dangers des mensonges et prétendent apporter la vérité sur les évènements.
Or d’après Marc Molitor et surtout Yves Lenoir, c’est loin d’être le cas.
Que ce soit sur les objectifs et la conduite des opérations, la personnalité et les responsabilités des "héros" Legassov et Chtcherbina, la chronologie des faits, la réalité des chiffres scientifiques et les effets de la radioactivité sur les corps il y a beaucoup d’erreurs, d’approximations et d’inventions (voir les liens ci-dessous).
https://www.lalibre.be/debats/opinions/le-succes-de-la-serie-chernobyl-pose-un-grand-probleme-5d6e859ef20d5a3c0216e20c
https://blogs.mediapart.fr/yves-lenoir/blog/300719/la-mini-serie-chernobyl-une-pseudo-fiction-perverse
Personnellement, ce qui me gêne le plus c’est que les auteurs insistent à raison sur les responsabilités soviétiques de la catastrophe, mais omettent de signaler les responsabilités occidentales et minimisent la dangerosité de l’industrie nucléaire en général.
En effet, la série oublie de préciser que l’URSS a bénéficié de l’aide internationale pour la construction du sarcophage et que lors de la conférence de Vienne en août 1986 (et non en 87 comme dans la série) Legassov, bien que présentant un rapport en partie biaisé, a informé le monde des failles de sécurité que présentait la centrale de Tchernobyl (et non pas comme dans la série, un an plus tard au procès des responsables).
Or, ce que ne dévoile pas la série c’est que les occidentaux ont demandé de minimiser le nombre potentiel de morts évoqué (4000 au lieu de 40000) pour ne pas compromettre l’avenir prometteur du nucléaire à l’Ouest comme à l’Est, ni d’indiquer qu’aujourd’hui encore la radioactivité de Tchernobyl continue de faire des victimes.
Par conséquent, cette série ne présente même pas l’essentiel de ce qu'il s’est passé à Tchernobyl et ses conséquences sur les populations, en se ménageant quelques libertés scénaristiques propres à toute œuvre de fiction, mais cherche plutôt à jouer sur l’émotion qu’un tel sujet peut provoquer au mépris de la vérité historique.
A noter qu’on frise l’indécence à montrer des visages ou des mains se disloquer instantanément du fait de la radioactivité (dans le 1er épisode), alors que ça se passe beaucoup plus lentement dans la réalité.
C’est bien évidemment de bonne guerre, me direz-vous, mais à ce moment là, les auteurs auraient pu s’abstenir d’en rajouter une couche en se posant comme défenseurs de la vérité et pourfendeurs des mensonges et de finir le dernier épisode avec des images d’archives accompagnées d’ infos prétendument vraies, alors que certaines sont carrément fausses.
Tant qu'ils y étaient, ils auraient également pu citer le nom du physicien biélorusse Vassily Nesterenko qui a grandement inspiré le personnage fictif joué par Emily Watson et qui a dans la réalité joué un rôle majeur à Tchernobyl.
** Pour moi, ce sont surtout les 2 premiers épisodes qui sont vraiment prenants, l'épisode 3 étant plutôt mou et le 4 glauque. Le 5 est bien réalisé, mais complètement inventé, puisque Legassov n'y a pas révélé au procès ce qu'il avait déjà dit plusieurs mois plus tôt à Vienne.**