Je ne sais pas par quel miracle j'ai enregistré cette série vu la critique déplorable que lui avait réservé mon journal télé (Télérama, pour ne pas le nommer). Je suis très souvent en rupture avec lui pour la production française, qu'il encense quand elle me laisse de marbre, mais là, c'est assez curieux, c'est l'inverse qui s'est produit pour la première fois : Marianne Levy a détesté et moi, c'est elle que je déteste pour son parti-pris incompréhensible à présent... (enfin, déteste, entendons-nous, ce n'est qu'un mot). Résumons : Cheyenne est dans une mouise poisseuse parce que son mari est en prison en Angleterre et qu'elle n'arrive ni à s'en sortir financièrement ni à mettre un terme à leur relation toxique. Lola colle aux basques de son amant arriviste parce qu'elle ne jure que par l'argent qui coule à flots, sans être trop regardante sur sa provenance. Il faut dire que ledit amant est une sorte de gourou du développement personnel qui lui ment sur le handicap imaginaire de sa femme pour se servir d'elle dans ses shows pipeautés du début à la fin. La rencontre entre les deux femmes, à un moment critique de leur vie, va faire des étincelles inattendues. C'est juste le point de départ; après, ça prend tout un tas de chemins escarpés qui réservent de magistrales surprises. Et ça donne l'occasion à toute une galerie de personnages qui auraient pu être caricaturaux de se démarquer des clichés habituels et de prendre une profondeur tout à fait bienvenue. On se retrouve avec des tas de ficelles dans les mains, dont on se demande comment les scénaristes vont parvenir à faire une tresse : un trafic de migrants, un maffieux assez beauf, un flic romantique, une région sinistrée économiquement, une police corrompue, des gros bras peu diserts, des autochtones bas de plafond mais gentils, sauf quand ce sont de vraies teignes, une frangine nymphomane, des voisins un peu miteux, dont une Thénardier à baffer, une petite-fille martyre, des africaines promises à des réseaux de prostitution, etc. Ça ferait presque beaucoup si ça n'était pas articulé avec autant d'astuce. Rien n'est laissé en retrait et tout prend une dimension tragique inespérée à la fin. Ça vaut vraiment le coup de se laisser entrainer jusqu'au dernier épisode. Une pièce grecque, ou presque ! Bref, de quoi démonter un à un les arguments d'une critique de Télérama dont on se demande si elle a vraiment vu la série, parce que, en plus, la réalisation est admirable et tire un parti somptueux des lumières blafardes du Nord. Ne parlons même pas d'un biais novateur dans l'analyse de la solidarité féminine, en tant que ressource pour une humanité meilleure. Une vraie bonne surprise, et française avec ça !