Imaginez un monde sans inégalité ni injustice, où la maladie et la pauvreté n’existeraient plus et où les hommes vivraient enfin en paix. C’est l’utopie que nous laisse entrevoir Childhood’s end, mini-série en trois épisodes diffusée sur Syfy en décembre dernier. Librement adaptée du roman de science-fiction Les Enfants d’Icare écrit par Arthur C. Clarke, le programme met en scène une Terre dirigée par des extra-terrestres bienveillants, répondant au nom d’Overlords (les Suzerains), chargés d’éradiquer toute forme de souffrance de la surface terrestre. Une transposition sur petit écran qui intervient à point nommé, à l’heure où la violence fait rage dans l’actualité planétaire.


Le premier épisode, d’une durée d’une heure et demie comme les deux suivants, pose les bases d’un récit prometteur. Un vaisseau apparaît dans la stratosphère et le monde se met subitement sur pause, en proie à de prochains changements révolutionnaires. Contrairement aux aliens de La Guerre des mondes ou ceux d’Independence Day, les Overlords viennent en paix. Une originalité qui ne manque pas d’éveiller notre curiosité comme celle des protagonistes. Qui sont ces êtres venus d’ailleurs pour répandre le Bien sur la planète ? Des magnats de la science ? Des dieux ? Nous apprenons qu’il s’agit en réalité de « superviseurs » ayant pour mission de mener l’homme vers son dernier stade d’évolution. Leur aspect – une peau rouge vif, des yeux jaunes, de grandes cornes et une paire d’ailes dans le dos – bouscule nos certitudes. Nous voici pourtant face à nos sauveurs, qui n’ont de diabolique que leur apparence.


Sous leur joug, finies la pollution, les guerres au Moyen-Orient et les maladies incurables. Pourtant, au lieu de mettre en avant ce que serait une Terre dépourvue de fléaux, la série se perd rapidement dans les poncifs du mélodrame mielleux. Impossible pour nous, spectateurs intrigués, de toucher du doigt cette utopie qui nous fait tant rêver. Les questions de fond – que deviennent les religions et les politiques ? Une révolte aura-t-elle lieu contre cette forme de dictature ? Où sont passés la culture et les arts ? La vie personnelle de tout un chacun se voit-elle améliorée ? – ne sont qu’effleurées au profit d’histoires amoureuses et familiales éparses, qui ne présentent au final que très peu d’intérêt. Si les cliffhangers parviennent tout de même à tenir le spectateur en haleine, l’éparpillement de la série, celle-ci se déroulant sur plusieurs décennies, l’empêche de traiter son propos avec davantage de profondeur.


Dès le deuxième épisode, nos espoirs de voir une série intelligente et philosophique s’envolent, faute à un traitement académique qui empêche le sujet de véritablement décoller. Les personnages manquent d’envergure, les effets spéciaux frisent parfois le ridicule et le côté contemplatif de la série flirte un peu trop avec le spot publicitaire. Le dernier épisode pointe pourtant une question que tout le cinéma de science-fiction se pose depuis plusieurs années : l’Humanité peut-elle survivre ailleurs que sur Terre ? Une interrogation que Childhood’s end s’empresse également d’escamoter par le biais d’une théorie bancale sur l’évolution, par peur de froisser les plus religieux d’entre nous. Une façon pour la série, qui se montre décidément bien frileuse, d’éviter d’aborder des sujets trop brûlants.


Dans le fond comme dans la forme, le programme pèche donc par son manque d’audace et semble malheureusement soumis aux attentes d’un public américain bien-pensant. En somme, les intentions du créateur Matthew Graham sont peut-être bonnes mais le résultat s’avère bien terne. Un format plus long aurait peut-être permis à Childhood’s end de respirer davantage et de créer à l’égard de ses personnages un véritable attachement, indispensable à la réussite de toute série télévisée. Le rêve vendu par Syfy restera donc à l’état de promesse, comme celui de l’arrivée d’un monde nouveau. Vous pouvez donc éteindre votre télévision et reprendre une activité normale : la fin de l’innocence, ce n’est pas pour tout de suite.


© airsatz.wordpress.com

CineDays
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le 6 mars 2016

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Amy  Furler

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