24 épisodes, on peut faire l'effort de poursuivre jusqu'au bout.
L'histoire est très intéressante, très élaborée, mais en même temps lacunaire. L'exemple le plus flagrant, c'est le pouvoir qu'a Aion de s'emparer des esprits et d'en faire des marionnettes. Alors, oui, on peut dire qu'il a ce pouvoir et admettre passivement les choses, sauf que, du coup, pourquoi Joshua, Fiore et Rosetta, et pas les autres ? Pourquoi à tel moment ? Et pour quelles finalités réelles à chaque fois ? Dès qu'on creuse, on sent bien que le scénario manque d'assises. Les raisonnements philosophiques, sur la religion, la liberté, etc., ne sont pas solides du tout et le concept temporel pour Chrono, Aion et les enfants immobilisés on repassera. La prophétie de 1981 est complètement nulle, ça tombe comme un cheveu sur la soupe.
Les personnages sont difficilement attachants. Les trois premiers quarts de la série, Rosetta est certes sympathique, mais c'est un personnage caricatural avec des gags non seulement basiques mais pas très efficaces. L'humour de la série ne fonctionne pas du tout, c'est comme si on avait gardé les écriteaux "ici mettre un gag" faute d'inspiration.
Pourtant, la série a des atouts qui devraient être passionnants. Sept apôtres apparaissent parmi les êtres humains, mais on a du mal à identifier une partie d'entre eux, tandis qu'un ancien clan de sorcières de la Forêt Noire en Allemagne a été décimé, avec pour seule survivante une fille toujours à la recherche de sa grande soeur disparue lors du drame. Nous avons une église chrétienne avec des soeurs, mais nous basculons dans le fantastique avec le fait qu'il existe des apôtres aux étranges pouvoirs et qu'il y ait un combat authentique avec des démons. C'est bien sûr un christianisme light et déformé à la manière japonaise, donc une hérésie pour un chrétien, mais la série tient la ligne d'exalter la foi dans cette sorte de chrétienté de fiction.
La principale apôtre va porter les stigmates du Christ et semble vouée au martyre pour laver les péchés du monde. On saura qui elle est vers la fin de la série, même si ça s'anticipe de très loin.
Autre hérésie pour un chrétien, mais une hérésie typique aussi des mangas et animés japonais, les démons peuvent s'emparer des apôtres et de leur pouvoir au point d'avoir pour programme d'inverser les valeurs. Cela est conduit assez habilement avec des scènes très intéressantes, comme quand le gentil démon prend la main marqué d'un stigmate et se fait brûler devant une foule qui n'identifie pas la manipulation.
L'héroïne principale est une soeur pas très sérieuse mais le coeur sur la main et très courageuse, elle est accompagnée d'un démon à apparence humaine avec lequel elle a passé un pacte, et est à la recherche de son frère qu'un autre démon lui a pris.
Bien que le fan service soit discret, les bas blancs de Rosetta sous sa jupe de bonne soeur ne sont pas trop mis en avant comme sexy, même s'ils le sont un peu, la série joue sur l'érotisme. Il y a une franchise d'amour entre Rosetta et son démon Chrono, et l'érotisme est particulièrement accentué dans le cas des prises de possession par l'antagoniste principal Aion.
Et c'est certainement cet érotisme qui permet le mieux de faire la transition entre un long début de série léger et comique, et une fin dramatique, avec tout le pathos qui s'y met. Toutefois, objectivement, il y a un gros défaut, car Rosetta change d'un coup de caractère à cause d'un événement, mais reste dans le changement de caractère, elle ne redevient pas elle-même, et faut avouer que ce n'est pas très convaincant.
Il y a aussi un grand nombre de personnages secondaires, mais soit leurs histoires ne sont pas claires (Remington), soit elles sont bâclées (Joshua, Azmaria, Satella,, Dufo, etc.). On dira qu'on évite de se disperser, mais bon...
Le dernier épisode vient après l'action qui a eu sa conclusion au 23e épisode et c'est le moment de grande intensité lyrique qui a dû marquer pas mal de fans de la série. C'est en effet un grand moment de poésie, très bien conçu, avec l'idée de la fuite du temps, de la mort et du crépuscule qui rejoint bien sûr le titre même de la série Chrono crusade (les deux orthographes Chrno et Chrono apparaissent dans le générique). Toutefois, je trouve que les 23 premiers épisodes auraient pu être meilleurs pour nous amener là.
C'est très poétique mais pour deux personnages pas assez incarnés.
La série a souvent de très belles images poétiques et symboliques, on a droit aussi à des dessins figés habiles. Par exemple, pour montrer la folie dans la ville, on a un accident de voiture à un carrefour new yorkais des années vingt, et on a un arrêt sur image avec un immeuble non pas droit, mais courbe.
Les interventions du savant font tiquer également, il a un côté deus ex machina mal venu et en même temps ses apports ne sont pas décisifs.
Cette série est tirée d'un manga du même nom, mais que ce soit la série animée ou le manga Chrno crusade a eu une influence sur Soul Eater et Fire Force, mais aussi sur Demon Slayer (Tanjiro qui tient un caisson avec sa soeur démon a pour modèle Chrono, et le train du rêve vient du train de l'araignée).