Après Lastman, c'était avec une certaine impatience que ceux qui avaient apprécié la série attendaient le nouveau projet de Jérémie Périn. Le réalisateur lors de cette première série avait montré qu'il connaissait parfaitement les codes de l’animation. Et c'est avec talent qu'il en use et abuse au maximum. L'animation est comme le veut le genre réduite à son plus strict minimum. Ce qui était une réelle volonté liée à l'économie de dessins, et devenu ici un style. Et Périn sait parfaitement capter l’essence des animés nippons pour l'injecter dans ses réalisations. Même s'il ne faut pas totalement se voiler la face sur l'économie de dessins, puisqu'elle est aussi clairement présente par volonté de réduire le coût des épisodes. C'est également une manière de diminuer la masse de travail. Mais Périn sait parfaitement se servir de cet élément. Ce qui devrait être un handicap, il le capte et le transforme pour en fait une véritable force. La construction est habilement faite, il abuse des codes tout en jouant constamment avec eux. D'un épisode à l'autre reviennent les mêmes séquences de transformation de personnages, d'attaques et de formules d'attaques. Le héros s'appelle Jung, il fait face à l'ignominie d'une espèce d'être monstrueux qui répond au doux nom de petit jésus. C'est un colosse rose qui extrait des personnages maléfiques de son fondement. Le parcours lors de cette création fait clairement penser à celui que fait Actarus dans la série Goldorak.
L’assemblage de ces éléments et de leurs codes rendent l'animé, grotesque, et formidablement drôle. Enfin faut-il encore avoir accès à ces codes, mais les animés japonais sont loin d’être une chose obscure, tout le monde en a vu. Les personnages ont recoure à l'ultra-violence pour résoudre les problèmes auxquels ils sont confrontés. Leur comportement est celui de total barjots. Jung lors de chaque combat a besoin d'analyser l'acte qu'il est en train de commettre. Pour cela une énorme main l'attrape, afin qu'il reste quelques instants dans ce lieu clôt. Dans cet endroit il est allongé et raconte tout à son psychanalyste. Les femmes dans ce monde portent la barbe, quant aux hommes, ils sont membrés de tronçonneuses à la place de leurs pénis. Les hommes se transforment en femmes et les femmes deviennent des hommes. Jung pour se rendre d'un endroit à l'autre se déplace sur une route de sang. Tout est absurde là-dedans, ça n'a ni queue ni tête, tout semble s'enchainer comme dans un rêve ou plutôt un cauchemar. Puisque tout n'est fait que de violence, de sexe et de sang. Les corps éclatent, sont déchiquetés, démembrés, écrasés, éclatés, écrabouillés, c'est une véritable pluie de sang qui s'abat sur les personnages. Ce parcours semble profondément barré, seulement il est celui de la psychanalyse, puisque ici il s'agit d'un homme qui doit affronter ses propres démons pour avancer. Chaque démon représente une nouvelle étape à franchir. C'est pas à pas que le héros au cœur brisé doit surmonter la perte de celle qu'il aime. Il n'est ni plus ni moins question ici que du rapport homme/Femme et des éléments qui séparent les deux. La frontière entre masculin et féminin est fine, voilà le pourquoi des changements de sexe des personnages. Pourtant c'est un énorme tas de choses qu'il faut affronter pour se reconstruire et retrouver le calme intérieur. La fureur de la perte d'un être cher doit se faire par paliers. Plusieurs étapes sont à franchir avant de se remettre totalement de cette cassure émotionnelle. Sous ce ton décalé voilà le thème abordé par la série. C'est absurde et débile, mais c'est ce qui résulte de la perte amoureuse une fois celle-ci surmontée. Finalement toute cette montagne d'épreuves semblant infranchissable n'était pas si difficile à affronter. Il faut savoir se faire violence et mener un combat intérieur pour surpasser la force des émotions .
Seul regret concernant la série la courte durée de ses épisodes qui ne font que six petites minutes. Ce qui est deux fois moins qu'un épisode de lastman qui eux étaient déjà très court. Autant dire que ça va très vite. On a vraiment l'impression que l'épisode vient tout juste de commencer qu'il est déjà terminé. Si Blackpills a choisi ce format court c'est parce que les animés étaient destinés à être visionnés sur des téléphones. Vermin et Peepoodoo ont la même durée. Le ton de l'animé est traité de façon sérieuse, mais tout est débile là-dedans. Et c'est ce décalage absurde qui rend le tout excellent.
Le travail de Perrin est très bon, il est en préparation d'un film, Mars Express qui sortira en 2021 ce qui est une formidable nouvelle, vu l'inventivité et l'humour dont fait preuve le bonhomme. S'il ose tout comme il l'a fait jusqu'à maintenant ça promet d'être une vraie secousse cinématographique. Difficile de croire qu'il fasse quelque chose d'aussi barré, car un film demande un gros investissement, et il va falloir qu'il trouve un public. Mais bon, Perrin jusque-là a fait comme il l'entendait, et les producteurs ont bien dû voir ses productions pour lancer le projet. En tout cas c'est enthousiasment de voir des gens qui ont grandi avec des références qu'ils arrivent à ressortir de cette manière, afin d'oser proposer un objet tel que celui-ci.