Ce qu’il y a de plus pitoyable dans l’art, c’est de passer pas loin d’un chef-d’œuvre. Mais c’est aussi de passer derrière un chef d’œuvre… C’est ce que nous appelons ici la Malédiction Sur Ecoute.
En ce moment le Professorino regarde Breaking Bad. Toute sa génération lui dit que c’est la plus grande série de tous les temps. Mais lui, brave petit, répond : « Mais non, c’est Sur Ecoute la plus grande série de tous les temps ! »
On en est là devant Dans leur Regard (When they see us), une série où on est prêt à tout accepter, devant un tel déni de justice. Cinq petits gars ont fait entre 6 et 14 ans de prison, accusé d’un viol qu’ils n’avaient pas commis. Mais voilà, ils étaient noirs, et devant la violence qui s’emparait de New York en cette année 1989, l’hystérie a pris le pas sur la raison. Pourtant, il n’y avait aucune preuve : pas de sperme, pas de sang, pas de témoins. Tout cela est par ailleurs formidablement joué par de jeunes comédiens talentueux. Qu’est ce qu’il cloche alors ? La réalité.
Une simple recherche dans Google valide ce que l’on pressentait : derrière ces enfants parfaits, ces familles parfaites, la réalité était moins reluisante. Bien sûr, ces jeunes gens n’avaient pas commis ce crime-là. Mais contrairement à ce qui est montré dans le film, des passants avaient bien été agressés et cette nuit-là, notamment des cyclistes. Un fait que les 5 de Central Park n’ont jamais nié.
Les familles n’étaient pas non plus parfaites. Il n’y a pas que des blancs (dont Trump) qui ont demandé leur condamnation. Ce blackwashing est stupide : dans le fond, nous sommes déjà d’accord avec la réalisatrice, on est prêt à entendre son histoire. Mais pendant les quatre heures qu’ont duré Dans leur Regard, on ne pensait qu’à ça : ces enfants sont-ils aussi gentils qu’Ava DuVernay le présente ? Les parents sont-ils aussi parfait ou ? Les blancs aussi racistes ?
Quel intérêt y a-t-il à diaboliser les blancs ? À angéliser les noirs ? Rien. Qui le prouve ? Sur Ecoute, évidemment. En présentant des personnages crédibles, avec leurs forces et leurs faiblesses, la série les rend crédibles… et attachants. En transformant son plaidoyer en film de propagande, Ava DuVernay rate sa cible. Qui était pourtant très facile à toucher
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