David Makes Man
David Makes Man

Série OWN (2019)

Les thèmes de l'adolescence malmenée, l'amitié, l'homosexualité, les parents de substitution et la solidarité des quartiers défavorisés de Tarell Alvin McCraney scénariste de Moonlight, se retrouvent dans David makes man, pour un portrait plutôt optimisme et qui s'adressera à tout public.


David (Akili McDowell) 14 ans, oscille entre être le pilier familial et la tendance à la procrastination, pris entre vie de famille, garde d'enfants, et vie scolaire pour surdoués. Une représentation du parfait étudiant, sourire de circonstance, langage de blanc et vêtements appropriés, démontrent rapidement le décalage. C'est aussi et surtout le cheminement intérieur d'un adolescent traumatisé par le deuil, aux tics permanents, stressé par son environnement scolaire à prouver ses capacités, et où viendra ensuite le retour dans son environnement familier, qui marquera le combat suivant, par la main que lui tend le gang de son quartier à pallier les défaillances financières d'une mère addicte qui lutte à conserver ses petits boulots.


L'acteur au naturel confondant nous rappelle à Eric Ruffin dans Transfiguration et à cette capacité à s'approprier un personnage complexe aux jeux d'expressions subtils, fuyant comme il peut l'environnement nocif dans lequel il se trouve. Mais contrairement à la gravité du personnage de Milo, également traumatisé par un deuil, et si on rejoint le nécessaire passage à l'âge adulte, David lui joue de sa séduction et de son visage lumineux.


Dynamisme de la narration, passage rapides et retours en arrières, nous laissant diriger par une temporalité tronquée et un montage décalé. Le cinéaste nous offre une mise en scène intelligente où les explications franches sont remplacées par ses apartés visuels et créatifs à saisir le conflit intérieur de David. Que ce soit les décors mouvants marquant l'enfermement, les visions fantomatiques de son ami aux discours réconfortants, ou son propre personnage dédoublé, sorte de garde-fou mental, l'ensemble se teinte d'un léger fantastique et prouve que l'image suffit à nous rendre les émotions et les ressentis du jeune homme.


Un récit marqué par quelques scènes à l'évocation plus dramatique nous rappelle à nos propres craintes lors d'une hallucination de toute beauté par ce qu'il convoque des pertes possibles et irréparables. L'enterrement d'un jeune du quartier prendra l'image d'un proche, symbole de l'urgence à choisir sa vie, nous plongeant un peu plus dans les errements traumatiques de David.
Mais ce sont aussi les touches d'humour ou les arrêts sur image réguliers, teintés de légèreté pour reprendre son souffle. On est tout autant séduit par David au regard papillonnant qu'il l'est par l'image de sa jeune voisine au sourire éclatant, séduit par l'espoir d'un futur baiser, sourire béat aux lèvres. Saisir les petits moments magiques des émois amoureux de l'adolescence avec tant de justesse en est jubilatoire.


Tarell Alvin McCraney offre ainsi une belle histoire sensible et où le portrait permet de mettre en valeur tous les personnages. De la mère combative (Alana Arenas), à l'ami abusé (Nathaniel Logan McIntyre), du dealer au grand cœur (Isaiah Johnson) aux jeunes hommes perdus (excellent Ade Chike Torbert), si rien de nouveau n'est traité ici, et si on peut regretter l'excès d'empathie et le sauvetage de tout son monde d'une destinée logiquement bien plus sombre, Tarell Alvin McCraney en s'appuyant sur de jeunes acteurs inconnus, reste suffisamment nuancé pour représenter un microcosme ouvert à toute condition sociale, de race et de genre, pour marquer la difficulté à grandir.

limma
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le 8 mai 2021

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