Les couilles du Japon
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le 29 mars 2016
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Pour une lecture en images plus souple et plus agréable
Teito Monogatari plus connu sous le titre de Doomed Megalopolis de par chez nous. Autant être franc tout de suite avec vous, ça va être très difficile pour moi de vous en parler de manière totalement objective (bon en même temps j’suis pas censé l’être ) étant donné qu’il s’agit purement et simplement d’un des tout meilleur OAV qu’il m’ait été donné de voir jusqu’à présent. Incontestablement dans mon top et bientôt dans le vôtre !
Au départ Teito Monogatari est un roman horrifique écrit en 1985 par un certain Hiroshi Aramata qui a connu un succès retentissant (3,5 millions d’exemplaires vendus au japon uniquement en moins d’un an, au bouche à oreilles et sans Internet… Belle perf! ) et que notre ami Rintaro c’est fait un plaisir d’adapter en 1991 en animé au travers de 4 OAV de qualité allemande. L’histoire prend place au début du siècle dernier à Tokyo, ville la plus peuplée à cette époque, en pleine révolution sociale, technologique et culturelle. Pour resituer le contexte nous somme sous la période Taïsho (1912-1926) quand le Japon qui sort à peine du Moyen Age se modernise à vitesse grand V sur le plan matériel (industrialisation lourde, économie de marché et armée de conscrit) tout en restant farouchement attaché à sa conception ancestrale et surtout spirituelle de la vie. L’expansion ahurissante de la ville et son développement continuel réjouit les bureaucrates éclairés de la capitale mais les préoccupe sur le plan métaphysique… ils craignent que l’esprit qui veille habituellement au bien-être de la cité - le dénommé Taïra Masakado - ne s'éveille suite à ces changements drastiques et brusques qu’ils ont mené pour les punir de cette débordante et arrogante ambition en détruisant leur œuvre. Cette punition tant redoutée prendrait alors la forme d’un gigantesque tremblement de terre qui réduirait cette « Neo » capitale calme et paisible en poussière…
Ici on retrouve les thèmes classiques avec lesquels les japonais aiment se faire peur c’est à dire les esprits maléfiques, les démons, les tremblements de terre évidemment et surtout la destruction de leurs capitale bien aimée, la belle Tokyo. Bien sûr c’est une crainte bien vivante chez eux qui est presque inscrite dans leurs gènes, comme vous le savez le pays est régulièrement secoué par de violentes décharges sismiques (Fukushima etc) et ce depuis des siècles. C’est donc une peur fondée et bien présente dans l’esprit japonais qui émoustille leur imaginaire un peu comme en France on pouvait avoir une peur viscérale et quasi anthropologique de l’Allemand à une époque.
Je me souviens avoir vu pour la première fois Teito Monogatari en VHS (la mythique collection mangas vidéo) en 1996 ou 1997, le tout était porté sur deux casettes contenant deux OAV de 40 minutes donc 4 épisodes en tout, maintenant disponibles en DVD et (BlueRay?).
Les deux premiers épisodes sont selon moi les meilleurs. Tout simplement une tuerie, d’autant plus qu’ils se suffisent à eux même et se terminent sur un évènement historique traité intelligemment et qui s’accorde bien avec le propos. Visuellement parlant c’est un plongeon dans le passé qui nous porte dans cette ville de Tokyo à mi-chemin entre la modernité et le moyen âge et c’est franchement plus que réussi. J’ai omis de rappeler que c’est le Studio MadHouse qui s’est chargé de produire ces OAV et comme à leurs habitudes ils ont fait un travail monstre, ajoutons à cela que c’est Rintaro qui est à la tête du métrage et donc forcément ça donne un résultat totalement satisfaisant. Les couleurs sont soignées et vivantes (j’ai rarement vu des couchés de soleil ou des soirs d’été aussi bien dessinés dans un anime c’est vraiment percutant…) un soin tout particulier a été porté sur l’architecture de la ville, ses bâtiments et ses ruelles d’époque qui semblent bien respectés, et bien que l’on reste dans la capitale on aura droit à une belle variété de lieu.
Mais surtout le gros plus de cette première partie, c’est bien évidemment le sieur Yasunori Kato ! Le grand Méchant de l’histoire qui pue le charisme à 100 kilomètre à la ronde et qui aura inspiré un paquet de personnages tout aussi réussi dans l’univers manga/Jeux Vidéo. Sans parler de toute l’héraldique de symboles occultes (pentagrammes et autres shikigami) introduite par Kato et qui fait désormais partie intégrante de l’imagerie traditionnelle de l’animation japonaise voir même du cinéma. Enfin bref vous l’aurez compris on est en face d’un des piliers de la sousculture jap.
Kato est un Onmyoji. C’est à dire un sorcier typique du folklore nippon dont les origines remontent à la mythologie japonaise. Et c’est à peu près tout ce qu’on sait sur lui… Certains disent qu’il est mort lors de la guerre sino-japonaise mais rien de sûr et à vrai dire on s’en fiche. Ce qui importe c’est qu’il remplit parfaitement son rôle de gros méchant qu’on aime détester tellement il en impose. Chacune de ses apparitions donnes des frissons et je ne sais pas par quelle magie mais on ne s’en lasse jamais. C’est quand même fort ! Vous en connaissez beaucoup vous des animes qui arrivent à vous foutre les jetons ? Bien évidemment l’ambiance générale aussi y est pour quelque chose et le tout fonctionne en parfaite symbiose. Ajoutez à ça les quelques affrontements (courts mais dynamiques et rythmés) entre Kato et les Onmyoji blancs et vous obtenez un pur bijou d’animation. La fluidité des mouvements et le rendu graphique sont aussi de qualité, on est tout de même chez MadHouse, une machine à vendre du rêve à cette époque en terme d’animés.
D’après ce que j’en sais le scénario des deux premiers OAV reprend le déroulement du roman originel mais je ne sais pas si l’épilogue est le même. Pour faire court, Kato souhaite réveiller l’esprit revanchard de Taira no Masakado le protecteur de Tokyo dans le but de raser celle ci de la carte et pour ce faire il a besoin d’un « hôte » qui pourrait accueillir l’esprit de ce bon vieux fantôme qui risque fort d’être de mauvais poils à son réveil. Sa cible est toute trouvée en la personne de Yukari Tatsumiya fille cadette d’une veille famille de l’aristocratie japonaise et accessoirement petite sœur de Yoichiro Tatsumiya, l’un des grands architectes de la nouvelle Tokyo. On apprendra au fur et à mesure du déroulement de l’histoire que cette famille ne tourne pas vraiment rond et qu’il y a quelque chose d’assez sale qui entoure ses membres…
Il n’en faudra pas plus pour attirer ce cher Kato…
Globalement l’intrigue est intéressante à suivre, on ne s’ennuie pas et les péripéties sont agencées de telle manière qu’on attend toujours la scène suivante avec impatience alors que celle en cour commence à peine. Alors bien sûr il y aura peut-être certaines lourdeurs qui se feront ressentir ici et là mais rien de bien méchant et après tout ça reste de l’animation faut donc pas trop en demander non plus ! :p
La fin qui mérite amplement d’être vue est tout de même audacieuse et Rintaro aurait facilement pu en rester là…Mais il a choisi de prolonger l’aventure avec Les OAV 3 et 4 qui ne reprennent pas le roman et clôturent le tout. L’épisode 3 débute sur les mêmes bases que les deux premiers. Techniquement, là encore c’est du tout bon. Niveau scénar l’histoire prend place quelques années après et on retrouve un certains nombres de personnages laissés à la fin de l’oav2 et de nouveaux visages font leurs apparitions dont celui de Keiko Mekata une prêtresse de renom qui va intégrer la famille Tatsumiya en épousant Yoichiro le grand frère. Avec Keiko nous avons droit à un deuxième personnage au taux de charisme qui affole les compteurs mais cette fois il s’agit d’une femme et ce n’est pas plus mal.
Quant au quatrième et dernier épisode, il est tellement surréaliste que je ne vous en parlerais pas. Vous pourrez aimer comme détester c’est selon vos affinités avec les maths.
Ha! Il y avait encore un dernier aspect que je voulais aborder rapidement. Doomed Megalopolis,en plus d’être une fiction d’horreur et de dark fantasy est aussi une fresque historique qui nous donne l’occasion de côtoyer un panel de figures authentiques ayant joués un rôle déterminant dans l’histoire de Tokyo et donc du Japon (rappelons que Aramata l’auteur originel est aussi historien universitaire de formation et que le roman est hyper documenté). Format OAV oblige Ils ne sont pas tous super développés dans l’animé contrairement au roman. Certains de ces personnages auront droit à un traitement et une implication scénaristique plus conséquente que d’autres mais leurs présence à le mérite d’apporter un certain cachet à l’ensemble qui n’est pas pour me déplaire et qui permet aussi de faire la lumière sur certaines figures clés des époques Taïsho/Meiji de manière ludique.
Pour conclure je dirais que Teito Monogatari est un cocktail de tout ce qui se faisait de mieux en matière d’OAV jap pendant l’âge d’or : une bonne mise en scène globale, un cachet visuel des plus appréciable, un méchant charismatique, de l’action, du glauque, du gore et en prime, de l’Histoire des maths et un peu de physique pour les intellos ! Et en plus il y a une VF pas dégueu du tout.
Cours consommer !
PS : Une de mes saga favorite du Jeux Vidéos la saga des Shin Megami Tensei aborde les même thèmes que Doomed Megalopolis à savoir La légende de Masakado et la nature métaphysique de Tokyo. C'est notamment visible à travers deux des meilleurs opus qui la composent et que vous connaissez peut être. Devil Summoner : Kuzunoha Raidou Tai (qui rend un brillant hommage à Megalopolis à travers son héros qui a un lien de parenté avec Kato) et Shin Megami Tensei IV le dernier épisode canon en date.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les années 80-90 l'age d'or de la Japanimation (partie 1 les séries)
Créée
le 14 mars 2014
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