Galactica
6.5
Galactica

Série ABC (1978)

« There are those who believe that life here began out there, far across the universe ! »

Avant d’acquérir ses lettres de noblesses au cours des années 2000, la saga Battlestar Galactica a débuté bien avant, à la fin des années 1970, juste après la sortie du premier Star Wars comme par hasard. C’est d’ailleurs le fondateur du studio ILM, responsable des effets spéciaux de la guerre des étoiles, qui prêtera main forte à l’équipe technique pour les premiers épisodes qui affichaient un budget particulièrement exceptionnel pour l’époque. L’ambition est clairement affichée et les moyens sont déployés en conséquence, néanmoins la série est vite tombée dans l’oubli et on va essayer de voir pourquoi ensemble et si une petite pépite s’y cacherait.


Bon déjà, les premiers épisodes sont pour moi de francs succès et réussissent parfaitement à me faire rentrer de plein pied dans l’intrigue avec ce déluge d’action, ces morts dramatiques et ces héros lancés dans une quête des plus périlleuses mais que l’on veut voir mener à terme. On ressent bien le désespoir de la situation et le dernier espoir que représente nos protagonistes dans cette relecture de l'exode des juifs d’Égypte sous la conduite de Moïse. Les bases sont posées pour croire en la série, en son sens du spectacle et de vecteur d’émotions fortes, mais celle-ci va assez vite changer de direction avec plus ou moins de succès.


Une ambiance légère récurrente va s’installer, à mille lieux de ce que l’on aurait pu croire vu le pitch de départ, on parle quand même d’une extermination quasi complète de l’humanité par une espèce robotique déterminée à finir le travail, et si elle marche plutôt bien avec de sympathiques comiques de situation, elle va malheureusement rentrer en conflit avec des enjeux qui devraient être un tant soit peu dramatiques et qui seront désamorcés par cette bonne ambiance. C’est d’autant plus dommageable que l’humour ne sera pas toujours très fin, voire un peu limite.


Je dois bien avouer que cette ambiance détendue a quand même fini par marcher sur plusieurs épisodes pour ma part, notamment grâce à la complicité entre Appollo et Starbuck quand ils se retrouvent dans des mésaventures presque aux airs de cartoon. Si on rentre pleinement dans le délire, on peut vraiment passer un bon moment en regardant de la SF d’un autre temps ou la simple promesse de voyager dans l’espace d’épisode en épisode émerveillait, comme en témoignent le générique et sa musique, mais dans ce cas-là je ne pense pas que ce soit Galactica qui soit la meilleure série pour ça, encore moins la plus emblématique.


Une structure narrative un peu routinière s’installe au fur et à mesure. Typiquement, une petite colonie a des problèmes qu’elle ne peut surmonter, Starbuck ou Appollo s’y pose comme par hasard et vient résoudre la situation avec des mises en danger qui ne tromperont personne, des méchants qui souvent n’en sont pas vraiment et des morales pas toujours très finaudes. De plus, je me demande quel est l’intérêt de ces mini trailers en début d’épisode qui peuvent carrément en spoiler la fin, c’était franchement déjà assez prévisible comme ça.


Fort heureusement, il y aura des tournants scénaristiques majeurs qui viendront casser cette routine, comme la découverte d’autres civilisations radicalement différentes de l’humanité comme des cylons, ou l’évolution du conflit et du rôle de Baltar en tant qu’antagoniste par exemple. Ça suffit pour que la saison ne soit pas trop ennuyeuse dans son ensemble mais ça n’empêche pas quand même certains passages d’être clairement moins palpitants que d’autres et dans une série aussi courte, ce n’est quand même pas génial.


La série ne prend pas forcément le temps de développer les relations entre les personnages, la relation entre Sérina et Appollo dans les 5 premiers épisodes est assez révélatrice du problème. En seulement quelques scènes, ils se rencontrent, s’apprécient, tombent amoureux, se marient et le fils de Sérina devient sans problème et sans nuance le fils d’Appollo. C’est très pratique mais ça montre bien une certaine paresse dans l’écriture qui non comptant de raconter une histoire très classique, peut le faire de façon précipitée tant elle a pas tant d’idées que ça pour la rendre intéressante à suivre.


A contrario, la relation entre Starbuck et Cassio va faire du surplace pendant très longtemps, le premier étant tenté de voir ailleurs au moins un peu et la seconde de jouer l’indifférente à ça en espérant quand même que ça change par la suite, sans que jamais vraiment ça n’évolue significativement, ce qui va finir par lasser. C’est assez rare que des relations entre des personnages soient vraiment bien travaillées, évoluant avec le temps avec cohérence et pertinence... j’aurai bien envie de dire Sheeba et Appollo mais comme ce n’est pas vraiment conclue d’une façon ou d’une autre, même pas.


Par ailleurs, si certains épisodes feront des efforts pour véhiculer des messages assez positifs, avec des personnages féminins courageux refusant de laisser leur homme s’en aller seul à la guerre, il y a quand même beaucoup de patriarcat dans tout ça. Un bon indicateur à ça c’est que beaucoup d’actrices de la série sont en réalité mannequins et ne joueront jamais dans beaucoup de films, ce n’est pas un hasard vu la qualité de leur jeu qui n’est malheureusement pas proportionnelle à leur charme indéniable. Non pas qu’une mannequin ne puisse se révéler être une excellente actrice, comme le prouvera la série des années 2000, mais ce n’est pas le cas ici.


Par exemple, Maren Jensen incarnant Athéna devait occuper un rôle central dans l’intrigue mais elle sera finalement mise largement en retrait tellement son jeu d’actrice ne conviendra pas. Un autre exercice d’écriture pour lequel la série fait preuve de facilité c’est la gestion de thématiques centrales à son propos comme le militarisme ou la religion qui sont partagés par un peu près tout le monde, notamment Adama qui perd beaucoup en crédibilité à croire dur comme fer en cette légendaire planète qu’est la Terre qu’il se met à chercher sans calculer les autres objectifs possibles.


Il y a bien quelques fulgurances passagères, comme lorsque le gouvernement veut lui retirer les pleins pouvoirs et qu’il dit à son second trouvant l’idée aberrante que c’est précisément quand on rejette cette idée avec autant de véhémence qu’il faut s’interroger sur ses propres motivations, s’il n’est pas temps d’abandonner le pouvoir. Mais comme l’épisode en question donnera totalement raison à la nécessité de laisser les rênes à Adama qui semble le seul capable de prendre et d’assumer les bonnes décisions, la subtilité du propos en prend pour son grade.


Une bonne idée du scénario tout de même, c’est d’avoir apporté aux humains un vocabulaire et des unités métriques proches mais différents du notre pour conférer une réelle identité très reconnaissable à cette série comme à cette civilisation humaine, ce qui servira la narration vers la fin du récit ou d’autres civilisations humaines seront rencontrées. Et bien sûr les gros mots qui ressemblent aux nôtres mais sans les reprendre tel quel constituent une espèce de censure assez mignonne qui colle bien à l’ambiance détendue décrite plus tôt.


Ce qui restera toujours réussi c’est assez paradoxalement, pour une série de science-fiction de l’époque, les scènes d’action qui profitent d’effets visuels assez convaincants et d’un très bon montage pour que ça reste un spectacle plaisant malgré le poids des années. Évidemment, il faut notamment être habitués aux maquettes mais la série a parfaitement conscience de ces allures et fait assez souvent la blague de montrer vulgairement une maquette comme si l’effet était raté pour finalement dézoomé et qu‘on s’aperçoive que c’était une maquette dans le récit, pour un effet comique réussi.


Par contre, si le design des vaisseaux, des décors… peut être assez réussi, les costumes peuvent être assez ridicules pour leur part, mention spéciale aux armures ultra chromées des cylons, quand ils se baladent dans un couloir bourrée de diodes, on a affaire à un spectacle lumineux aussi illisible que marrant. En dehors de ce petit problème, il y a un bon mélange entre décors naturels et constructions artificielles intelligemment répartis sur l’ensemble de la série, il y a bien quelques petites excentricités quand ça s’attaque à des civilisations très particulières, mais ce n’est pas un problème.


En somme, Battlestar Galactica fut à ses origines la promesse d’un spectacle aux grandes ambitions techniques et au récit tragique pour finalement devenir une série de Science-Fiction bien réalisée à l’ambiance détendue qui souffre notamment de facilités et maladresses d’écriture, limitant son potentiel. C’est très différent de ce que sera la nouvelle version des années 2000 et même si ce n’est pas une grande réussite à mes yeux, ça reste intéressant à voir par curiosité, mais il faut vraiment s’attendre à autre chose.

damon8671
6
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le 21 août 2019

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damon8671

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