HBO prend des risques...pour notre plus grand plaisir. Cette mini série n’a pas rencontrée son public, pourtant «Getting On» est bien une petite pépite originale, où le thème du médical s’éloigne de ce qui nous a été servi jusqu’à présent. Son format de 6 épisodes de 30 minutes pour 3 saisons va à l’essentiel et mérite de s’y accrocher. Les premiers épisodes peuvent franchement dérouter, mais une fois le rythme pris, l’accumulation de folie douce et l'efficacité humoristique ne nous permet plus de la lâcher. Un grand regret pour l'absence de saison 4. La 3 permet toutefois de boucler la boucle de façon assez réussie, évitant au moins la frustration d’un final bâclé.
Chaque épisode et chaque saison traite d’un thème se reliant tous les uns aux autres pour suivre l'évolution d’un service de soins palliatifs dans un hôpital fictif de Californie.
Il en ressort un mélange de vie, de bonne humeur tout autant que de désespoir et d'affliction. La mise en scène sobre fait un clin d’œil au documentaire et renforce l’adversité des situations. Un huis-clos aux couleurs blafardes, des plans sur des visages fatigués, des jeux de caméra parfois étouffants parfois nerveux mais toujours dans le feu de l’action et le bon choix d’absence de musique. Parfois excessives, les saynètes démontrent toute l’absurdité et le drame pour un réalisme cru mais toujours comique. Très bien écrite, cette série sait varier les tons et reste émouvante.
Le docteur Jenna James (Laurie Metclaf) en chef de service excentrique et énervée, Dawn (Alex Borstein) passive, peu impliquée et en prise avec des histoires d’amour compliquées qui en oublie presque où elle se trouve. Didi (Niecy Nash), devra elle, faire preuve de sang-froid face à ses collègues et leurs divers problèmes personnels. Patsy (Mel Rodriguez) homosexuel qui s'ignore, ne se sent à sa place qu’en forçant ses troupes au développement personnel. La rencontre explosive de caractères divergents et le regard perplexe et inquiet des patients soumis à la folie ambiante.
Les personnes âgées sont mises à l’honneur. Bien «vivantes» elles se doivent de supporter, et c’est peu dire, leurs soignants. Entre fugues, vues de l’esprit, rébellions, histoires d’amour, il n’est pas question de les oublier et de les reléguer au rang d’indésirables ou d’invisibles. Et c’est une des belles idées des créateurs, entre autre trouvaille scénaristique.
Quelques visites d’acteurs venus apporter leur contribution notamment Harry Dean Stanton, en vieillard amoureux, mais tous les seconds rôles sont justes et jouent de leurs faiblesses avec un grand talent.
Un vrai plaisir de suivre les péripéties de nos quatre soignants, jouant sur les diverses caractéristiques des uns et des autres et qui semblent être autant déroutés que leurs patients. Il faut gérer les familles, récupérer un lit quitte à virer un occupant, nettoyer un acte de «révolte scatologique», courir après les uns, chercher un traducteur, gérer les innovations techniques parfois catastrophiques, et autres fantasmes amoureux...
Chacun se heurte à l’adversité et chacun devra faire preuve de savoir-faire... à défaut de savoir-être.
Laurie Metclaf est excellente en chef de service, froide, cinglante et un tantinet déjantée et offre une performance jouissive. Son jeu fait de multiples expressions, oscillant entre déprime, crise de nerfs, perplexité de tous les instants et grande humanité parfois bien particulière, est toujours un grand moment. Entre discussions vaines et quiproquos savoureux, la difficile tenue du service, et en même temps sa lutte constante pour sa propre reconnaissance, elle tient la série à elle seule.
On suivra par exemple son acharnement à sa collecte de matière fécale pour ses recherches, le domaine choisi fait forcément sourire mais tout le sérieux du propos vient en parfait décalage. Les ruses diverses et variées pour conserver son unité et bien sûr son poste. Entre une unité peu performante et des agents pour le moins décalés, elle n’aura de cesse de contrecarrer les freins de son chef prêt à sacrifier la «recherche» pour la bonne santé financière de l’hôpital, et qui contribue à stresser constamment notre petite troupe déjà bien occupée à s’occuper d’elle-même.
Une satire jubilatoire pour une vision cynique de notre société, du manque de moyens financiers flagrants mais aussi de notre engagement face à l’accueil et l’accompagnement des personnes âgées. La perte d’autonomie et le peu de considération face à la vieillesse. On y parle en filigrane de l’euthanasie, ou encore de la maladie d’Alzheimer et bien sûr de la mort. La critique des systèmes de santé est perspicace sans être appuyée. Il s’agit plutôt d’en rire, il est indéniable que cette série sait taper là où il faut pour nous balader entre déprime, émotion et grandes envolées verbales. Tout est réuni pour faire rire d’un sujet sérieux.
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Trailers :
saison 1
https://youtu.be/6T0BrfGLn54
saison 2
https://youtu.be/77WKR27-u-M
saison 3
https://youtu.be/PYY_KzYGtPQ