Il y eut une époque où H était le sommet de la coolitude collégienne, avec la Classe américaine sur VHS, la Cité de la peur sur VHS, et les Tatoo. (Je vous parle d’un temps que les moins de vingt-cinq ans…) Tu laissais ta sœur, ses copines et leur acné découvrir l’érotisme avec les 2 Be 3 et Alliage, et tu parlais de l’épisode de la veille avec tes potes qui muaient comme toi. Vous vous moquiez gentiment de ces personnages de losers, tout en admirant l’auto-dérision pleine d’aplomb des comédiens, sans trop remarquer ce qu’il y a d’extrêmement misogyne dans H. Vous vous gargarisiez de cette ambiance, mi-humour potache mi-humour noir. Vous ne vous formalisiez pas des rires enregistrés.
Tu te demandais aussi ce que foutait là Jean-Luc Bidault, que tu n’as toujours pas vu dans un autre film. Ça se voit, qu’en réalité il est le seul bon acteur de cette sitcom, et que le personnage de Strauss bonifie les épisodes dans lesquels il apparaît. Car H est la série qui a lancé Éric, Ramzy et Jamel, et ça n’est pas forcément ce qui est arrivé de mieux au cinéma ; en même temps, ils — Jamel en particulier — n’ont jamais vraiment fait autre chose que du H par la suite, en-dehors de quelques films parfois ambitieux mais dans lesquels il ne brillent pas par leur talent.
Bien sûr, il faut se rappeler qu’en 1998 les comédies d’AB Productions, aussi pitoyables fussent-elles, avaient leur public, et qu’Urgences cartonnait. H caricature évidemment les deux. Certaines situations sont des tours de force comiques. Certains gags y sont franchement drôles. Une fois. Moins drôles la deuxième fois. Et franchement chiants à partir de la quatrième. C’est le problème des séries scénarisées à la chaîne. Peut-être faudrait-il que quelqu’un se dévoue à regarder les quatre saisons, en sélectionne les meilleurs épisodes sur les critères de la non-redondance et de la noirceur débile de l’humour, et il resterait quelque chose d’assez bon.
Novembre 2016 : j’ai fini par tout voir ! (Je ne sais pas si le point d’exclamation se justifie, mais passons.) J’ai aussi lu deux ou trois bricoles sur le tournage, sur les acteurs, sur tout ça. La conclusion : il y a effectivement des choses très drôles dans certains épisodes de H, disséminés çà et là au fil des quatre saisons. Disons qu’en termes de « qualité » globale, la première est la plus regardable, mais que les vraies pépites – et les gros ratages – sont dans les trois autres, avec la palme de l’irrégularité pour la dernière. Par ailleurs, le trio d’acteurs principaux n’est jamais aussi bon que quand il fait dans le pur burlesque : une scène d’« Une histoire de permis » voit Jamel et Ramzy se balancer des assiettes de purée à la gueule, c’est franchement primaire mais franchement drôle. Et voir les scènes de mime d’Éric ou de Ramzy devient tordant.