Quand la vengeance se mange tiède et que la satire tombe à plat

Insatiable, la série Netflix de 2018, partait avec une idée risquée : raconter l’histoire de Patty, une adolescente harcelée pour son poids qui, après une transformation physique, décide de se venger de tous ceux qui l’ont méprisée. Ajoutez-y une pincée de satire sociale et une bonne dose d’humour noir, et vous obtenez un cocktail potentiellement explosif… mais qui finit par ressembler à une boisson mal dosée, où chaque ingrédient se bat contre les autres.

Patty, jouée par Debby Ryan, passe de l’ombre au "pouvoir" avec l’énergie d’une héroïne de teen movie, mais le personnage reste difficile à cerner. Elle est censée incarner une vengeance cathartique pour toutes les injustices subies, mais son parcours devient vite chaotique, entre des motivations floues et des choix qui frisent l’absurde. On ne sait jamais vraiment si on doit la soutenir, la plaindre ou lever les yeux au ciel devant ses actions souvent excessives. Patty veut de la revanche, mais elle semble aussi en quête d’attention, de validation et de tout autre chose qui passe par là.

Le plus grand problème d’Insatiable, c’est sa difficulté à se décider entre satire mordante et comédie dramatique. La série aborde des thèmes lourds, comme le harcèlement, les troubles de l’image de soi et la superficialité de la société, mais elle les traite souvent avec une légèreté qui frôle la maladresse. Les blagues, censées être ironiques, tombent à plat, et les situations absurdes s’accumulent au point qu’on se demande si le but est de choquer, de faire rire ou simplement de faire en sorte qu’on ne prenne rien au sérieux.

La galerie de personnages secondaires est tout aussi excentrique que Patty, mais leurs arcs narratifs semblent tirés d’un feuilleton qui hésite entre le grotesque et le pathétique. Bob, le coach de beauté qui voit en Patty son ticket pour la gloire des concours, est un mentor décalé mais souvent caricatural, dont les dilemmes semblent aussi artificiels que les sourires sur scène. Les autres personnages, que ce soit les parents, les amis ou les rivaux, entrent et sortent de la série comme dans un manège, chacun apportant son lot de clichés et de stéréotypes.

Visuellement, Insatiable adopte un style qui rappelle les comédies colorées et vives, mais cet éclat superficiel contraste fortement avec les thèmes sombres qu’elle tente de dépeindre. Ce choix esthétique aurait pu fonctionner avec une satire bien ciselée, mais ici, il accentue l’impression d’une série qui flotte entre deux eaux, sans jamais vraiment choisir sa direction.

La série aurait pu offrir une critique acerbe des concours de beauté et de la pression sociale autour de l’apparence, mais elle finit par sombrer dans les mêmes pièges qu’elle voulait dénoncer. En voulant être irrévérencieuse, elle s’embourbe dans des blagues forcées et des rebondissements inutiles qui sapent la force du message. On termine la saison en se demandant si Insatiable voulait être un miroir déformant de notre société ou une simple succession de gags mal ajustés.

En résumé, Insatiable est une tentative de satire qui manque de mordant, un mélange d’humour noir et de drame adolescent qui peine à trouver son équilibre. Ce qui aurait pu être une série audacieuse se transforme en un récit qui joue sur des stéréotypes sans réussir à les transcender. Pour ceux qui recherchent une vraie comédie noire avec de la profondeur, mieux vaut passer son chemin – car ici, la vengeance est surtout insipide.