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3.4
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Websérie YouTube (2016)

Ce qui est marrant avec Youtube, c'est que, quand on croit avoir touché le fond, non, y aura toujours un type capable de faire pire, de délivrer des vidéos plus nulles que les autres. Ho, je pense aussi qu'il y a de bonnes choses sur Youtube, contrairement à ce que la majorité des célèbres youtubeurs peuvent faire croire. En tous cas, un genre dans lequel les vidéastes se surpassent, ce sont les webséries ambitieuses. Récemment j'ai découvert "Le dernier monde" qui était très mauvais, mais au moins il se passait des choses et ça faisait rire (involontairement, cela va sans dire). "io", malheureusement, ne fait pas rire, même malgré lui ; bon j'ai quand même souri à quelques aspects z, mais on s'emmerde tellement devant cette websérie, que très vite la bouche se referme et grimace.


Le scénario est mauvais. Pour la simple et bonne raison qu'il ne se passe rien. Au début j'étais un peu désarçonné : la fiche SC indique 45 minutes par épisode, pourtant les épisodes n'en font que 3 à 5 minutes (attention le dernier avoisine les 9 minutes). Le plus étrange, c'est que le deuxième épisode commence par un résume qui résume... tout ce qu'on ne voit pas dans le premier épisode. Je me dis que j'ai dû cliquer sur le mauvais lien, mais non, c'est bien le deuxième épisode que je suis en train de regarder. Je me dis que ce que j'ai vu n'était qu'une bande annonce et qu'il doit exister quelque part les fameux épisodes de 45 minutes. Et là je me souviens d'un panneau vu je ne sais plus où : cette websérie est une esquisse. Ok. Donc, plutôt que de faire un bon pilote solide pour convaincre des investisseurs de donner leur blé, l'auteur choisit de ne tourner qu'une scène par épisode. J'aurais bien envie de dire qu'il a les scénarii complètement écrits et qu'il a volontairement choisi une scène parmi toutes les pages mais... je crois plutôt qu'il n'y a rien d'écrit, qu'il a une vague idée de ce que chaque épisode doit raconter et qu'il a décidé de ne montrer qu'une partie, un dialogue ou quoi. Misère...


Si au moins il décidait de raconter quelque chose. Voilà le problème, ça ne raconte rien. Les scènes montrées sont narrativement vide. 'Moi' qui parle de tout et de rien avec un autre personnage, 'Moi' qui marche, 'Moi' qui fait du vélo, 'Moi' qui découvre qu'il n'y a pas cours et qui a l'air vachement déçu dis donc... Voilà toute la tension narrative à laquelle on a droit.


Le reste ? la vraie histoire ? ellipsée ! Et résumé dans la première minute de l'épisode. Ça aurait pu être intéressant de jouer avec l'ellipse, ç'aurait été une audace narrative intéressante. En général c'est fait avec humour (je ne sais plus quelle série humoristique comprenait un résumé de l'épisode précédent qui n'avait rien à voir avec ce qu'on avait vu ; dans "Knight and day", il y a une série d'ellipses bien senties quand Cameron Diaz tombe dans les pommes et se réveillent dans des situations toujours plus folles), ici c'est au contraire très sérieux. Et puis, l'épisode ne laisse place à aucune imagination, tout est raconté soit dans le résumé, soit par des personnages qui font une mise au point.


Les personnages ne sont pas construits. Là aussi ça fait mal. On voit des gens parler, discuter, mais on se fout de tout. Aucun n'est caractérisé, aucun n'évolue. Enfin, il y a une évolution fantastique concernant 'Moi', amis la narration est telle qu'on ne la vit pas à ses côtés. Du coup, ça compte pas, parce que dans un cas pareil, tout peut arriver, l'auteur fait ce qu'il veut, il n'implique jamais son spectateur dans le processus. De toutes façons il n'y a pas de processus. Pour qu'une évolution soit intéressante, il faut pouvoir en établir les causes et les effets. Rien de tout cela ici. On se rapproche pour le coup d'une grosse caricature mal employée. Mais je n'aime pas parler de caricature en mal, parce que tous les films, toutes les histoires son construites par les caricatures, par les stéréotypes, par les clichés. Sans cela, les histoires deviendraient incompréhensibles. Ce qui rend un cliché acceptable, c'est son utilisation, c'est dedans qu'on peut 'originaliser' cet élément, le rendre unique, et ainsi faire oublier le fait que ça a déjà été fait et refait. En tous cas, les personnages mal construits, ça se ressent surtout dans les personnages secondaires. Y a bien la brune russe (je crois) qui apparaît un peu plus et apparaît comme un peu plus consistante, mais ça reste très mince. Le pire, je crois, c'est le pote hacker (épisode magnifique de nanaditude d'ailleurs) qui pourrait ne pas exister tellement il ne sert à rien (l'épisode aussi du coup).


Les dialogues sont assez mauvais. Quand ça ne nous dit pas ce qu'on a manqué, ça reste au niveau de la banalité peu intéressante. Que ce soient les flirts ou les révélations (mais on peut pas trop en dire quand même pour te protéger hein - moi je pense que l'auteur sait pas trop non plus), c'est juste inintéressant. Quand le singe de la fin apparaît, sa tirade est soporifique : beaucoup de grands mots pour ne rien dire.


Il y a beaucoup d'épisodes/personnages qui ne servent à rien en plus. Ce qui est encore plus triste. Ce ne sont même pas des fausses pistes, non, juste un moyen d'allonger la série. Peut-être que si on avait la totalité de l'épisode (45mn), ça passerait mieux, parce qu'il y aurait de la tension, des enjeux... mais bon, j'extrapole. Car il n'est pas sûr qu'avoir un épisode plus long amènerait des enjeux lorsque l'auteur décide délibérément de nous montrer un vide narratif plutôt que de bien vendre son projet avec des scènes importantes à la narration (genre plutôt que de voir un gars parler à sa psy, j'aurais bien voulu voir le moment où il découvre la voix, les premiers dialogues entre 'Moi' et sa petite voix. Petite voix qui, comme tous les autres personnages, n'est pas construite, n'est pas caractérisée, malheureusement (je me permets de le préciser au cas où ça n'aurait pas été évident dans mes précédents paragraphes).


La série ne fait pas rire volontairement. Pourtant, il y a des blagues. En témoigne ce fantasme où le héros file un pain à un type. Sauf que c'est pas drôle. Parce qu'il n'y a pas de mise en contexte intéressante, parce qu'il ne suffit pas de dire proute pour faire rire, qu'il faut encore bien placer la manière de faire la proute. Ici, rien n'est installé, on déballe donc les vannes, mais on s'en fout. On se sent un peu gêné même.


Faut dire que la mise en scène n'aide pas. Le concept de POV, déjà, n'est même pas respecté. Il y a les caméras de surveillance, qui ont un sens par rapport au 'scénario', mais on a aussi et surtout des inserts qui n'ont rien à faire là, des moments où on quitte le point de vue de 'Moi' sans que ce soit justifié. Et donc, l'auteur ne parvient pas à aller au bout de son idée. Il veut tout filmer en POV, mais à un moment il se dit : hooo mais ce serait cool d'avoir un plan comme ça là. Ben oui, c'est cool, mais c'est sortir de son concept... à un moment, il faut choisir comment on raconte les choses. Cette série aurait pu être filmée de bien des manières différentes (l'aspect POV ne trouve justification que dans un épisode où on se trouve dans un monde virtuel ; d'ailleurs on sait pas trop ce que c'était que ce monde, si on sait y retourner ou quoi...)., l'auteur a fait un choix, mais il n'arrive pas à s'y tenir.


Tout en respectant le POV, on a aussi des inserts qui foutent en l'air le concept. Enfin ça dépend, si c'est un souvenir ça passe, mais si c'est juste pour montrer un personnage éloigné de plus près, c'est foireux (ou alors il aurait fallu que le personnage soit très éloigné, ainsi l'insert se justifierait pour que le spectateur comprenne de qui il s'agit, amis c'est pas le cas ici).


Le travail de caméra se veut réaliste, avec hochements de tête et Cie. Mais ça ne fonctionne pas. Il suffit de prendre pour exemple le film "Hardcore Henry" qui aurait dû être grosse référence pour ce film (ou au moins le clip réalisé par le réalisateur selon le même concept) : la caméra ne peut pas se comporter réalistement comme un vrai regard, sinon ça brouille ce que l'on doit voir. Les points de vue, dans les films, sont le plus souvent fluides, ou si pas, comme dans les found footage, servent à quelque chose (dans les bons found footage du moins) : il ne faut pas filmer l'inutile (surtout quand on a que 4 minutes pour raconter quelque chose).


Le montage comporte aussi ses problèmes. Le clignement d’œil est une idée idiote, ringarde. Déjà parce que ça ne fonctionne pas vu la forme choisie (on croirait que le héros est borgne), ensuite parce que c'est trop lent, un clignement d’œil, on ne le remarque presque pas. Ici, on le ressent trop. Et il est inutile quant à l'installation du concept. Les cuts passent assez mal aussi, forcément. Le plus souvent, en POV, on s'imagine de longs plans séquences, ici ce n'est pas le cas, ou alors ce sont juste des dialogues chiants. Le réalisateur de "Hardcore Henry" trouve le bon moment pour couper et passer à un autre plans. Ici, ce n'est jamais le cas. Peut-être une question de dynamisme ? Ou bien le fait que le son soit raccord, pas l'image (ben oui, le personnage continue de parler comme si de rien n'était alors qu'on a du cut en vue subjective...). Y a aussi la pire scène d'action au monde dans ce bar... c'est super mal filmé, le découpage ne rime à rien, le montage, c'est du n'importe quoi. Je me suis bien marré aussi dans la séquence de fin où le héros révèle ses pouvoirs. C'est très cheap.


La qualité de l'image laisse à désirer. On dirait que l'auteur étalonne ses épisodes pour donner un aspect plus coloré, mais il y a un épisode (celui où il baise la russe) où l'image est toute crade, toute plein de grain : soit il a changé de caméra, soit il a oublié d'étalonner... dans les deux cas, ce changement n'a pas de sens et ne fait que montrer le manque de professionnalisme de l'auteur.


Les acteurs sont très mauvais et ce dès le premier épisode. L'acteur qui prête sa voix à 'Moi' s'améliore un peu sur la fin mais est toujours trop plat. C'est dans le résumé des épisodes précédents qu'il se révèle plus juste, sans doute parce que plus dynamique. Le casting est naze : on ne croit en aucun rôle. Seul celui qui porte son masque passe car il paraît grand et fort et vu qu'on voit pas sa tête, on peut s'imaginer n'importe quel autre âge. Alors que pour le reste, ben on stagne dans la même tranche d'âges, ça manque donc de diversité.


Le son est assez mauvais, rendant parfois les dialogues peu audibles. Y a des petits effets bien cheap et ringards (j'en reviens à la scène des pouvoirs dans l'épisode final). La musique, même si déjà entendue, très convenue, passe. Bon, les compo ne sont pas géniales, mais au moins on n'a pas envie de se boucher les oreilles (d'ailleurs c'est marrant, l'auteur propose son OST sur son compte Youtube, j'ai l'impression que tous ses morceaux mis bout-à-bout dureraient plus longtemps que la série elle-même.


Les effets spéciaux ne sont pas top. Le manque de texture dans le monde virtuel ne choque pas, même si ça a l'air d'avoir été fait dans les années 90 (j'ai pensé au film "Le Cobaye" avec Pierce Brosnan, mais en pire), mais disons que ça aurait pu être mieux fait aussi (on dirait que ça a été fait avec un filtre sur un programme de montage gratuit, c'est cheap et enfantin).


Bref, je ne sais pas si c'est la première oeuvre française réalisée en POV, mais ce qui est sûre, c'est que c'est la première à proposer une histoire qu'on doit imaginer soi-même bien que les grandes lignes soient résumées en début d'épisode ou dans un dialogue chiant durant l'épisode. C'est très mauvais, ça ne raconte rien, c'est mal filmé, l'auteur ne va pas au bout de son concept, on sourit de temps en temps face à ses maladresses involontaires mais trop de scènes chiantes contrebalancent ce sentiment de légèreté. Tout est donc à refaire...


PS : plutôt que de faire 5 minutes par épisode, 5 minutes chiantes qui plus est, pourquoi ne pas avoir réalisé un bon pilote et tenter de le vendre. Au pire, si ça marche pas, on a au moins un truc de bon à regarder (évidemment, il faudrait imaginer que ça puisse tenir en un épisode, avec fin ouverte au cas où des gens voudraient filer du pognon pour la suite). Parce que là, ça raconte quasiment rien, et le peu que ça raconte est mal raconté : cette série, c'est un peu le guide pour convaincre les gens de ne pas filer de pognon pour faire un truc bien.

Fatpooper
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le 8 juil. 2016

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