Si le corps est la prison de l'esprit,symbole de notre finitude, que se passerait t'il si nous étions capables de nous en affranchir ? Cette problématique, pilier de réflexion de nombreux courants de pensée, pourrait laisser penser qu'il n'y a sûrement plus rien à apporter, plus rien à dire...
Et pourtant ! Ce questionnement taraude l'humain depuis bien plus longtemps que l'émergence du numérique. Certaines religions, où les avatar prennent une place clé dans leur mythologie, posaient déjà une réflexion profonde sur la désincarnation du corps au profit d'un esprit qui perdure.
Questionnement millénaire donc, jalonné d'œuvres littéraires et de grand penseurs qui ont pavés la voie à des pistes de réflexion, on pourrait se pencher durant des heures sur la question.
Et pourtant,à l'orée d'un grand bouleversement à venir, parlons ensemble de Kaiba.
Bienvenue dans un univers où le corps et l'âme sont désormais sécables, où il est possible de transférer ses souvenirs d'un corps à l'autre pour accéder à l'immortalité et où tout ce qui fait notre individualité a disparu. Suivons ensemble l'histoire d'un être ayant perdu tout souvenirs de ce qu'il était, et qui, en quête de réponses, va effectuer un voyage à la fois Initiatique et identitaire. Sous le voile chatoyant posé sur l'univers de Kaiba se tapit une agonie silencieuse qui coule dans les veines de chaque être.
Pourquoi ?
Car c'est une élite dominante et cachée dans les hauteurs qui profite pleinement du changement de corps et de tout les bienfaits. Parmi eux, un roi millénaire surveille en silence ses sujets, appliquant une politique extrême de contrôle des souvenirs.
Face à cette politique, un groupe de rebelles tend à interdire cette pratique, jugée immorale, et à accepter notre mortalité et notre finitude.
Bienvenue dans Kaiba.
Tout semble si cartoonesque et si coloré qu'au premier abord, on n'aurait presque envie de ne pas prendre cette œuvre au sérieux. On observe l'inspiration des dessins animés des années 20 et du Petit Prince, et l'on juge d'un œil mauvais le trait enfantin qui en émane.
Pour autant l'usage d'une mise en scène aussi singulière n'est pas là pour faire joli, bien au contraire. Car au travers de cette toile de fond colorée, une teinte grisâtre en émane, apportant avec elle des scènes d'une maturité et d'une violence innommable.
Car si l'on juge souvent le fond au détriment de la forme, elle pourtant bien expressive dans cet anime, et cherche à traiter certains axes sans censure aucune. Les dérives du corps, poussés dans ses limites les plus extrêmes, jusque dans le sexe, nous fait écho à un certain joyau de Mamoru Oshii. Si les 6 premiers épisodes présentent doucement le monde que re-découvre notre protagoniste, les 6 autres nous ramène au fil rouge dissimulé ça et là dans l'histoire, pour offrir un final mélodieux et résonnant autant en cœur qu'en âme avec notre héros.
La musique fait donc la part belle, à la fois mélancolique et joviale, elle laisse une saveur douce amère en bouche qui ne nous quitte que longtemps après.
Kaiba nous parle donc de notre rapport au corps, mais aussi aux souvenirs. À ceux que l'on laisse derrière soi et que l'on confie à d'autres. À ceux que l'on garde profondément ancré quelque part dans un recoin caverneux de notre esprit.