Après le succès de la version papier, il est de coutume sur l’archipel nippon de décliner l’oeuvre en animé et L’attaque des titans ne déroge pas à la règle. Soutenue par un budget que l’on devine confortable, la série de 25 épisodes tente de rester le plus fidèle possible à sa génitrice de cellulose.
L’histoire prend place dans une dystopie médiévale saupoudrée d’une technologique steam punk light. Un siècle plus tôt, l’humanité s’est découverte un prédateur impitoyable qui a menacé son existence : les titans. Contraints, pour assurer leur survie, de se cloîtrer derrière des murs gigantesques, les survivants oublient, génération après génération, que la menace se fait chaque jour plus vivace. C’est dans ce contexte que l’on suit Eren, jeune homme traumatisé et accessoirement monomaniaque, qui ne vit que pour la destruction des titans.
Malgré ses charmes indéniables, L’attaque des titans est une oeuvre frustrante qui laisse un goût amer à la fin de sa première saison. Si l’aspect technique est dans la moyenne haute des productions actuelles (décors magnifiques, cgi bien intégrées, séquences d’action grisantes, démesure des titans etc...) il en va de même pour le chara design un peu terne, une animation hors combat faiblarde, des dialogues statiques et redondants. On se retrouve devant un shonen pur jus simplement coloré à l’hémoglobine.
Malgré tout, l’univers développé est intéressant, voire original. La société humaine qui a emergée de cet holocauste est fondée sur des classes bien distinctes ( soldats, dirigeants, commerçants, prolétaire, religieux etc...) et les enjeux politiques existent même s’ils demeurent très discrets. Même constat pour la religion du Mur qui annonce de belles promesses qui n’arrivent jamais à éclore. On est continuellement frustré car là où il faudrait développer ces aspects de la société, les interactions entre les classes et leurs réactions face à la menace titan, on se retrouve trop facilement sur les rails d’un animé lambda avec un héros n’exprimant que révolte et fureur à l’image de ses compagnons tous formatés dans la grande tradition du shonen. L’auteur nous garde trop souvent dans l’ombre de ces colosses, fascinants et terrifiants certes, s’attardant sur l’évidence et effleurant à peine l’essentiel. On devine que l’édifice est imposant, structuré, mais l’auteur nous laisse à hauteur de fondations, même après 25 épisodes. Je ne serais pas de cette ascension si celle-ci devait excéder les 3 saisons et proposer un relief si peu accidenté.
Si L’attaque des titans s’en sort finalement mieux que la concurrence, et c’est là le paradoxe, c’est par cette dimension malsaine que les titans traînent dans leur sillage. Les thématiques abordées ici sont plutôt matures (guerre, deuil, lutte des classes etc...) pour un shonen. Les titans, avec leur apparence pataude, leur attitude enfantine, autant dans leurs déplacements que dans leurs mimiques, contribuent à créer un sentiment de malaise quand on découvre la barbarie dont ils sont capables. Car en toile de fond, il s’agit bien d’une guerre qui se déroule sous nos yeux, cruelle, insoutenable, impartiale. La mort fauche sans distinction, sans prévenir, dans toute son obscénité. Si l’impact des premiers épisodes et de quelques autres sur la barbarie de la guerre est indéniable, la stérilité des dialogues ou la redondance jusqu’à la nausée de certains en atténue la portée. Même si le public cible est adolescent, il faudrait que les auteurs de shonen évoluent dans leurs codes de narration. Le public shonen est intelligent, ouvert à plus de subtilité. L’abreuver de scène trash provoquera une émotion à court terme mais sans message approprié sa réflexion restera atrophiée. Si L’attaque des titans peut marquer une rupture dans sa catégorie, elle se situe uniquement dans ses choix visuels mais certainement pas dans ses personnages monotâches et leurs discours abscons ou simplets.
Ses défauts inhérents au genre mis à part, l’animé est agréable à suivre, les scènes de combats étant spectaculaires, les cliffhanger indissociables de chaque fin d’épisode, l’univers et ses titans apportant autant de questions que de réponses, l’envie de savoir garde toujours une avance sur l’amertume.